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Page:Revue des Deux Mondes - 1846 - tome 13.djvu/367

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est constant que la majorité appartient encore à l’aristocratie territoriale dans le corps électoral aussi bien que dans les deux chambres du parlement ; et les difficultés que plusieurs membres du cabinet éprouvent pour leur réélection ne permettent pas d’en douter. La Grande-Bretagne est donc placée entre deux forces qui semblent devoir se paralyser l’une par l’autre, et, en face d’une pareille situation, il est plus naturel de prévoir l’impuissance du cabinet de sir Robert Peel que de compter sur la formation de celui de lord John Russell. Dans huit jours, le parlement sera assemblé, et le grand problème sera posé, sinon résolu.

L’Allemagne est toujours dans une agitation stérile et une fermentation sans résultat qui semblent passer à l’état chronique. On dirait qu’elle est condamnée à être toujours à la veille d’une révolution, mais jamais au lendemain. La Gazette Universelle de Prusse a publié les résolutions royales relatives aux diverses demandes formées par les états provinciaux, et l’attente générale d’une constitution pour le royaume a été encore une fois trompée. Pendant que les correspondans des divers journaux disputaient déjà sur le siége des états, que les uns plaçaient l’assemblée représentative à Berlin, les autres à Brandebourg, le roi préparait une manifestation qui ne laisse plus aucun doute sur sa résolution de maintenir l’état de choses existant. Ce prince a remercié la minorité des états de la province de Prusse de ce qu’elle s’est refusée à s’associer à la manifestation constitutionnelle émanée de la majorité, et de ce qu’elle a remis avec une pleine confiance tout l’avenir du pays et des institutions entre les mains du roi. Toutes les propositions tendant à la publicité des débats provinciaux, à la liberté de la presse périodique, à l’établissement du jury, ont été repoussées, et, si ces résolutions royales ont trompé de nombreuses espérances, elles ne paraissent pas avoir provoqué une agitation menaçante pour l’ordre public.

La Prusse essaie, en matière de religion, ce qu’elle a si heureusement exécuté en matière de douanes, et elle a formé à Berlin une sorte de Zollverein protestant. Malheureusement pour le cabinet prussien, les croyances sont plus récalcitrantes que les intérêts, et il n’y a rien à attendre, pour l’unité religieuse de l’Allemagne réformée, de ce synode où les discussions paraissent avoir été non moins amères que stériles. Le parti piétiste reprend, dit-on, le terrain qu’il avait perdu, et le roi paraît s’abandonner à cette tendance avec un redoublement d’énergie. — En Saxe, la lutte parlementaire, engagée avec tant de vivacité, a déjà perdu la plus grande partie de son ardeur, D’importantes publications périodiques ont été défendues, et la publicité des débats judiciaires sera probablement le seul résultat de cette session, qui semblait s’ouvrir à la veille d’une crise sérieuse. Le Wurtemberg est toujours occupé de l’état alarmant de la santé de son roi, et l’Autriche a reçu la visite de l’empereur de Russie avec une sorte d’indifférence et de froideur qui a, dit-on, vivement blessé le fier monarque. L’archiduc Étienne étant reparti pour Prague sans avoir attendu l’arrivée du tsar, on en a conclu que les négociations du mariage entre ce prince et la grande-duchesse Olga