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Page:Revue des Deux Mondes - 1846 - tome 13.djvu/919

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chambres faisaient porter de plus en plus au matériel de la marine, à ses approvisionnemens, à ses ressources, la peine de l’augmentation obligée de l’armement et de la force active. Chaque année, sous l’empire de ce système, les prévisions inscrites au budget, pour des constructions neuves, étaient abaissées au-dessous des besoins, et chaque année les constructions réalisées restaient forcément au-dessous de ces prévisions même. Les travaux et les magasins demeuraient de la sorte sous le coup d’une souffrance forcée et d’une situation sans issue.

A partir de 1835, il s’opère, dans l’opinion des pouvoirs publics, une petite réaction en faveur de la marine. On ne l’envisage plus comme une institution parasite ; on la traite avec moins de dédain et de rigueur. En 1837, une ordonnance royale vient en aide à ce mouvement, et cherche à asseoir les armemens et les constructions sur de nouvelles bases. Désormais on laissera décroître le nombre des bâtimens à flot, de manière à ce qu’ils se réduisent à 20 vaisseaux de ligne et à 25 frégates, et l’on conservera sur le chantier un même nombre de frégates et de vaisseaux à 22/24 d’avancement ; enfin 13 vaisseaux et 16 frégates en construction serviront à remplacer les bâtimens du même rang, à mesure qu’ils auront été lancés.

Ce n’était là évidemment qu’une combinaison provisoire et qui ne devait, les faits l’ont prouvé, porter remède à rien. Elle reposait sur le maintien d’une paix constante. Les évènemens de 1840 se chargèrent de donner un démenti à ces illusions ; ils créèrent à la marine une position toute nouvelle. L’attitude prise dans le Levant par notre escadre d’évolution, et l’éloge qu’en firent les officiers anglais eux-mêmes, causèrent dans le pays une satisfaction mêlée d’étonnement. On consentit dès-lors à reconnaître que notre flotte est un des élémens essentiels de la grandeur du pays, et un instrument de défense digne d’attention et d’intérêt. Depuis ce moment, les allocations du budget allèrent toujours croissant, sans qu’il s’élevât dans les chambres la moindre objection contre des sacrifices nécessaires. Il y eut un élan fécond sur tous les détails du service. Le personnel s’accrut dans une proportion considérable, l’état des armemens atteignit le chiffre de 240 bâtimens à la mer ; enfin les travaux des chantiers reçurent une impulsion énergique, si bien que dans le cours d’une seule année, en 1842, les constructions furent avancées dans la proportion de 5 vaisseaux et demi. Il faut ajouter que cette activité ne s’est pas soutenue, et qu’elle est aujourd’hui rentrée dans les limites d’autrefois.

C’est en présence de cette situation que le ministre actuel propose