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n’aura pas été reconnue par les lois du Brésil ; la seconde, parce que la Felicitade, ayant été arrêtée et saisie injustement, alors qu’il n’y avait point d’esclaves à bord, et ne pouvant pas un seul instant être considérée comme appartenant à la Grande-Bretagne, n’avait aucun titre à capturer l’Echo. En conséquence, les accusés furent mis en liberté.

Des obstacles de ce genre pourront sans doute être surmontés, mais ne peut-il pas s’en présenter d’autres aussi embarrassans ? Voilà donc l’Angleterre rencontrant pour la première fois une résistance sérieuse à ses vues politiques et philanthropiques. Les difficultés que l’exercice du droit de recherche pour la répression de la traite avait soulevées, lorsqu’il s’était agi des puissances du premier ordre, la France et les États-Unis, par exemple, ont été adroitement tournées. A l’égard du Brésil, on ne s’est pas cru obligé à de pareils ménagemens. Si la nation brésilienne, outragée dans ce qu’un peuple a de plus cher, demeure inflexible, ne serait-on pas en droit de conclure de tout cela que la question du droit de visite, même pour la France et les États-Unis, n’a pas trouvé une solution aussi complète qu’on avait pu s’en flatter ? Du conflit entre le Brésil et la Grande-Bretagne peuvent surgir des complications inattendues, car la cause du Brésil intéresse toutes les puissances maritimes, elle touche aux points les plus délicats du droit des gens. La force et l’arbitraire ne sauraient trancher le nœud, et qui pourrait dire que ce différend, naguère imperceptible, ne prendra pas de tout autres proportions, et ne renferme pas le germe des plus dangereux embarras, non-seulement pour le cabinet de lord John Russell, mais aussi pour la paix du monde ? L’avenir seul nous l’apprendra.


PAUL GRIMBLOT