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Page:Revue des Deux Mondes - 1846 - tome 15.djvu/622

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tout, en continuant à Vienne le rôle le plus obséquieux ; Si l’on voulait à toute force discuter les éventualités d’un avenir que nos prévisions ne peuvent encore atteindre, certes ce n’est pas la liberté qui manquerait de chances brillantes à opposer aux espérances diplomatiques de l’absolutisme. N’est-il pas certain, en effet, que l’état le plus libre sera le plus fort, et partant celui qui triomphera en Italie ? Ne se rappelle-t-on plus les triomphes obtenus par la France libérale au nom et par la force des principes ? A-t-on oublié que l’indépendance sortit un jour tout armée de l’Italie à la voix de Napoléon, et ne voit-on pas que ce faux libéralisme de comtes et de marquis, en voulant recommencer l’œuvre de Napoléon au profit des princes, expire comme un misérable plagiat dans des réminiscences qui aboutissent au statu quo ?

Non, ce n’est pas à l’absolutisme qu’il appartient de constituer l’unité italienne. Comment réclamer l’unité, l’indépendance, au nom de l’absolutisme d’un prince, sans empiéter aussitôt sur le droit divin d’un pape ou d’un roi, sans accepter par là même le rôle impossible de conquérant, de révolutionnaire sans principes ? Seule, l’idée constitutionnelle peut, même dans le cercle des intérêts actuels, développer, en étendant son influence, les germes d’une condition meilleure, seule, elle peut hâter le jour où l’unité, dans la sphère politique comme dans celles des intérêts matériels, ne sera plus un vain rêve pour l’Italie. Seule, elle peut rallier ce peuple d’individus, fonder une nationalité nouvelle sur la vieille terre du pape et de l’empereur. Tandis qu’aujourd’hui l’Italie absolutiste n’enlèverait pas un village à l’Autriche, il n’est pas un prince, pas un ministre qui ne pût conquérir des sympathies illimitées en reprenant par les constitutions le travail interrompu de la renaissance. C’est donc à l’idée constitutionnelle d’introduire dans le domaine des réalités le fantôme brillant qui, au moyen-âge, errait à la surface du pays, de Vérone à Pise, de Milan à Naples. Evoqué par la France, un moment ce fantôme a reparu, et aujourd’hui, caché sous des ruines, il jette encore l’effroi dans tous les gouvernemens, qu’au moindre bruit de guerre les conspirations enveloppent de tous côtés.

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