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Page:Revue des Deux Mondes - 1846 - tome 15.djvu/827

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en Suisse les avantages que la liberté du commerce extérieur procure ; il en reste assez néanmoins pour attester la fécondité de ce principe. « J’ai pénétré, disait M. Cobden dans une des mémorables séances de la ligue, j’ai pénétré dans ce pays par tous les côtés : par la France, par l’Autriche et par l’Italie, et il faut vouloir tenir ses yeux fermés pour ne pas apercevoir les remarquables améliorations que la liberté du commerce a répandues sur la république ; le voyageur n’a pas plutôt traversé la frontière, qu’elles se manifestent à lui par la supériorité des routes, par l’activité et la prospérité croissante des habitans[1]. » On a déjà vu, par quelques-uns des faits que nous avons cités, et auxquels nous pourrions en ajouter bien d’autres, que le progrès de l’industrie manufacturière n’y est pas en reste avec le progrès de la culture du sol.

Pareille, ou peu s’en faut, était la situation de la Saxe avant qu’elle se fût absorbée dans l’association douanière allemande[2]. Avec un sol pauvre, avec une administration douce, mais peu active, n’ayant d’ailleurs ni capital ni crédit, ce petit pays avait réussi à se créer, grace à la liberté des échanges au dehors, une industrie manufacturière puissante, capable de se mesurer avec l’industrie anglaise sur les marchés lointains. Et pourtant, sans parler de la faiblesse des ressources de ce pays tout faisait obstacle à sa prospérité : sa situation géographique, sa petitesse, sa dépendance, et surtout la politique suivie par les états voisins. Sans contact avec la mer, entouré d’une multitude de petits états dont les douanes s’élevaient à chaque pas comme des barrières, privé de la faculté d’entrepôt, et, à certains égards même, des facilités du transit, il avait triomphé de tant d’obstacles par la seule vertu du principe qu’il avait adopté. Si les salaires y étaient faibles, ils étaient sûrs, et le bas prix, des subsistances en compensait l’exiguïté. Ils se fussent levés sans peine, si, à la salutaire action du régime du libre échange, la Saxe avait ajouté celle des institutions de crédit.

Ils sont malheureusement en petit nombre les pays qui ont adopté cette sage conduite : partout ailleurs une politique plus ou moins restrictive a prévalu. Disons pourtant que la plupart des gouvernemens se sont abstenus de frapper de droits les produits naturels Sans comprendre toute la gravité des restrictions qui atteignent les produits de ce genre, sans être retenus par la crainte des monopoles que ces restrictions

  1. Londres, 3 mai 1843. 6 Voyez Cobden et la Ligue, par M. Frédéric Bastiat.
  2. Voici quel était le tarif saxon pour les principaux articles manufacturés : (en quintal)
    Tissus de coton, 1 thaler – Tissus de laine autres que draps, 1 thaler – Draps, 2 thalers – Tissus de soie, 4 thalers – Parfumerie, modes, orfévrerie et bijouterie, 2 thalers.