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la Suisse occupent les principales divisions du territoire des cantons que nous venons de nommer. Bâle-Campagne et l’Argovie occidentale sont réformées ; l’Argovie orientale, toute catholique, touche, de l’autre côté, à une population protestante considérable, celle du canton de Zurich ; l’élément protestant prédomine dans le canton mixte de Thurgovie ; les catholiques, au contraire, ont un avantage marqué dans l’état de Saint-Gall, bien que le chef-lieu de ce canton soit un des principaux points d’appui de la réformation dans la Suisse orientale, et qu’un autre district, le Rheinthal, compte moins de catholiques que de protestans. Zurich est, en population, la quatrième ville de la confédération, même entre les seules villes allemandes elle ne peut réclamer, sous ce rapport, que le troisième rang ; mais, si l’on considère son importance intellectuelle et commerciale avec les avantages qui dérivent de sa position (laquelle en fait l’intermédiaire naturel entre la région agricole du plateau et la région pastorale des Alpes), on comprend facilement que le rôle de capitale de la Suisse orientale soit échu de bonne heure à cette ville, et qu’elle l’ait conservé sans difficulté jusqu’à nos jours.

Au sud-ouest de la zone rhénane, la moyenne vallée de l’Aar renferme le canton de Soleure, la meilleure partie de celui de Berne et le pays allemand de Fribourg ; presque tout le canton de Lucerne appartient également à cette division méridionale du plateau helvétique. On y reconnaît le voisinage immédiat des Alpes à l’élégance fière et grandiose d’une nature d’ailleurs féconde et variée ; la richesse de ces districts se fonde sur une agriculture savamment patiente, et l’on n’y trouve aucun centre considérable d’industrie qui puisse balancer la prépondérance des intérêts ruraux. La république de Soleure a constamment repoussé la réformation : en l’admettant, celle de Berne l’a rendue dominante dans la portion la plus vaste et la plus peuplée du territoire helvétique ; mais, quand on pénètre dans la Suisse orientale, la religion catholique, seule professée dans le canton de Lucerne, reprend la supériorité. Le domaine du protestantisme embrasse le tour entier du lac de Bienne, quoique les évêques de Bâle fussent demeurés jusqu’en 1798 suzerains de son principal district. Soleure, Lucerne et Berne elle-même, villes bâties pour contrebalancer les pouvoirs féodaux, et qui ont grandi dans la proportion des conquêtes faites par leur corps de bourgeoisie, gardent maintenant encore la physionomie que leur vocation spéciale leur avait imprimée jadis : ce sont des centres d’administration, des sièges de gouvernement. Au troisième rang pour la population parmi les cités suisses, Berne ne vient qu’au cinquième sous le rapport du mouvement intellectuel et commercial : elle cède le pas sur ce terrain, non-seulement à Genève et à Bâle, mais encore à Zurich et à Saint-Gall. Toutefois son importance politique est hors de proportion avec celle de toute autre ville, et, par une sorte de déférence