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Page:Revue des Deux Mondes - 1847 - tome 17.djvu/141

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incontestable de généralité. Bien des faits curieux, quoique d’un moindre intérêt, étaient venus se joindre à ces résultats importans ; mais, depuis que l’appareil de plongeur nous avait permis de recueillir en abondance les neufs d’un grand nombre de mollusques et d’annélides, M. Edwards se consacrait presque uniquement à l’embryogénie. Les faits relatifs au développement des êtres ont eu de tout temps un intérêt puissant ; ils ont acquis de nos jours une importance nouvelle. Y a-t-il pour le vrai philosophe un spectacle plus attachant que de voir la vie manifester progressivement sa présence dans un corps jusque-là inerte en apparence, et transformer une graine, un œuf, en plante ou en animal ? Le développement d’un germe quelconque réalise par ses phénomènes d’évolution des métamorphoses plus étranges que celles qu’ont rêvées les poètes ; par ses phénomènes d’épigénèse, il nous fait assister à de véritables créations plus incompréhensibles encore. Toutefois ces mystères, s’accomplissant sous l’œil des observateurs, restèrent long-temps des faits merveilleux, mais isolés, qu’on se bornait à constater. Aujourd’hui on demande à ces faits la solution des plus hauts problèmes de la philosophie naturelle. Où finissent, où commencent le règne végétal et le règne animal ? Qu’ont de commun les représentans de ces deux types fondamentaux de la création animée ? Quels liens, rattachant les fils aux pères constituent cet être de raison que nous avons nommé l’espèce ? Admirables questions que l’embryogénie résoudra peut-être, lorsque, renonçant à de vieilles habitudes, les naturalistes ne borneront plus leurs études à quelques-uns des représentans des types les plus élevés, mais étendront leurs recherches jusqu’aux derniers échelons des grandes séries ! Qu’on ne taxe pas d’exagération notre prédilection pour les êtres inférieurs : animaux ou plantes, ce sont eux qui résoudront bien des problèmes jusqu’à ce jour rebelles à tous nos efforts. L’histoire scientifique des dernières années est là pour justifier en tout point cette assertion. Si la physiologie générale, enrichie des faits les plus inattendus, tend aujourd’hui à se modifier ; si elle répudie à tout moment quelque ancienne erreur, héritage des siècles passés ; si ses doctrines, de plus en plus larges, embrassent un horizon chaque jour plus étendu, ces progrès incontestables ne sont-ils pas dus surtout aux hommes qui, après avoir vainement étudié les chênes et les mammifères, ont reporté leurs investigations sur les algues et les zoophytes ?

Au nombre des plus difficiles problèmes que se soient posés les naturalistes, il en est un dont ils n’atteindront peut-être jamais la solution définitive, tout en se rapprochant incessamment de ce but, à peu près comme en géométrie certaines courbes ne rencontrent qu’à une distance infinie la ligne droite qui leur sert de limite. Ce problème est celui de la méthode naturelle, qu’il faut bien se garder de confondre avec la classification. Par la méthode, le naturaliste apprécie l’ensemble des