Aller au contenu

Page:Revue des Deux Mondes - 1847 - tome 17.djvu/274

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

4 vaisseaux de Dumanoir, rencontrés par les 4 vaisseaux et les 4 frégates de sir Richard Strachan, succombaient le 5 novembre, sous le cap Ortegal, après la plus magnifique résistance. Le 25 octobre, le vice-amiral Rosily arriva de Madrid à Cadix. Des 33 vaisseaux qu’il venait commander, il ne trouva plus que 5 vaisseaux français et 3 vaisseaux espagnols. Il arbora son pavillon à bord du Héros, mais ne changea point la fortune de l’escadre. Aucun des vaisseaux qui avaient suivi le pavillon de Villeneuve ne devait revoir les ports de France. Le Héros, le Neptune, l’Algésiras, l’Argonaute et le Pluton, faibles restes de cette puissante flotte, constamment bloqués dans Cadix par une escadre anglaise, tombèrent, en 1808, entre les mains des insurgés espagnols.

Trafalgar marque le terme de la grande guerre maritime. Le combat de Santo-Domingo et l’incendie de nos vaisseaux en rade de l’île d’Aix par les brûlots de l’amiral Gambier et de lord Cochrane vinrent d’ailleurs achever de porter le découragement dans les rangs de nos escadres. Après ce dernier revers, la guerre navale, si amoindrie déjà, se réduisit pour la marine française à des proportions indignes d’un grand peuple : elle n’offrit plus à nos officiers que des excursions désespérées à travers une nuée d’ennemis contraints de rendre hommage à leur glorieuse audace : sublimes tentatives dont nous avons écouté bien des fois l’attachante histoire, immortels souvenirs que nous aimerions à rassembler un jour pour les offrir à l’émulation d’une ardente jeunesse, bien digne assurément de venger les malheurs de nos pères ! Mais, pendant qu’il lançait ainsi ces enfans perdus au milieu de l’océan, l’empereur rassemblait de toutes parts les élémens d’une marine nouvelle. Le destin, qui le poursuivait sans relâche, ne lui laissa point le temps de recueillir le prix de ses efforts. Quant à l’Espagne, déjà prête à se détacher de notre cause, elle vit, après Trafalgar, sa marine factice rentrer dans le néant, d’où un projet gigantesque l’avait fait sortir pour un jour.


XI.

Telles furent les conséquences de cette fatale campagne, ouverte sous de plus heureux auspices. Quand nos vaisseaux débloquaient Cadix et le Ferrol, quand l’Angleterre consternée tremblait pour les Antilles, tremblait même pour ses propres rivages, qui eût osé penser que ces premiers succès préparaient de si grands revers, et que la campagne d’Angleterre se terminerait comme avait commencé la campagne d’Égypte ? Ces deux événemens, Trafalgar et Aboukir, s’expliquent cependant l’un par l’autre ; ils s’enchaînent et se complètent : ce sont deux épisodes de la vie d’un même homme, deux périodes presque inévitables de la vie d’une même marine. Puisqu’une première épreuve