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Page:Revue des Deux Mondes - 1847 - tome 17.djvu/286

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où on ne trouve malheureusement ni houilles françaises à protéger ni houilles étrangères à repousser. De quelque côté donc que l’on porte ses regards sur toute cette ceinture de la France, on reconnaît que l’existence des droits protecteurs ne s’y justifie en aucun sens. On est tenté de s’écrier partout Qui donc y a-t-il à protéger ici ? Un seul point de notre frontière échappe à cette observation, c’est celui qui regarde le bassin de Valenciennes Voyons si, là du moins, les mesures restrictives s’expliquent.

Les houillères du bassin de Valenciennes ont en face d’elles, de l’autre côté de la frontière, celles qui constituent le bassin de Mons, dont elles ne sont, à vrai dire, que le prolongement. Sur ce point, la concurrence existe, cela n’est pas douteux, quoiqu’il y ait encore à cet égard quelques réserves à faire, car Mons fournit des houilles grasses que Valenciennes ne produit pas. Nul doute aussi que les extracteurs français ne réclament une protection contre cette concurrence : ils formeraient une exception trop honorable s’ils n’aimaient pas à grossir leurs bénéfices en prélevant une contribution sur le pays. La question est de savoir si cette protection est nécessaire. Pour se mettre à l’aise sur ce sujet, il suffit de considérer les positions. Des deux parts, les conditions d’extraction sont, à fort peu de chose près, les mêmes, ou n’établissent que des différences insignifiantes dans les prix de revient. Or, les houillères françaises ont l’avantage sur les autres d’être placées à l’extrémité occidentale du grand bassin carbonifère et plus près des grands centres de consommation du pays. Elles ont, en outre, depuis long-temps à leur service d’excellentes voies navigables, de belles routes et maintenant un chemin de fer, ce qui ne leur laisse, quant aux voies de communication, rien à désirer. De Mons à Paris, le transport de la houille, par les voies navigables, revient à 17 ou 18 fr. le tonneau, tandis que de Valenciennes à Paris il ne revient en moyenne qu’à 13 ou 14 fr.[1] ; on remarque des différences semblables dans presque toutes les autres directions. L’avantage de la position étant donc tout entier du côté des houillères françaises, à quel titre ou sous quel prétexte réclameraient-elles la protection ?

Si l’on considère la situation financière des compagnies qui exploitent ces mines, on trouve encore plus de raisons de décider. Les extracteurs de Mons, moins favorisés, ainsi qu’on vient de le voir, par leur position, grevés, en outre, d’un droit d’importation sur leurs produits, ne laissent pas, dans l’état présent des choses, de faire des bénéfices considérables ; on peut augurer de là que les bénéfices réalisés par les extracteurs français sont fabuleux, ce qui est vrai. Les actions de la compagnie d’Anzin,

  1. Du Concours des Canaux et des Chemins de fer, par M. Ch. Collignon, ingénieur en chef des ponts-et-chaussées.