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Page:Revue des Deux Mondes - 1847 - tome 18.djvu/290

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RECETTES.


francs
1° Coton (produits divers de l’hectare estimés à 300 francs) 300,000
Consommation locale Blé ou pain pour 240 familles[1] (2 kil. et demi par jour) 88,000
« Viande (1 kilog. environ par jour pour chaque famille) 80,000
« 2° Comestibles divers (beurre, lait, œufs, légumes) 42,000
« Logemens (à 100 francs environ par famille) 20,000
« Combustible 10,000
« 3° Vente des produits alimentaires non employés, abats et issues de bétail (toisons, suifs, cuirs, cornes, engrais) 35,000
4° Intérêt du capital de réserve placé sur hypothèques, environ 15,000
Total 590,000

Au premier aperçu, les recettes promettent sur les dépenses une plus-value d’environ 50 pour 100 ; ajoutons que ce revenu doit être élevé progressivement par le perfectionnement des cultures, par la mise en valeur des terrains vagues, par le produit des plantations, qui, seules, promettent dans huit ou dix ans, à raison de 1 franc par pied d’arbre, un surcroît de 40,000 francs. Le produit serait encore augmenté, à mesure que le capital réservé trouverait son emploi dans les cultures. Admettons donc provisoirement un excédant de 190,000 fr. En prélevant un cinquième, soit 38,000 francs pour la part de l’impôt, pour l’extension de l’entreprise, et pour constituer un fonds d’assurance, on aura 152,000 francs à partager en dividendes entre le capital et le travail, ce qui élèvera l’intérêt de l’action à plus de 12 pour 100, et donnera pour salaire éventuel à chaque famille ouvrière une somme de 456 francs. Aux yeux de quelques personnes, cette prime d’encouragement offerte au travail paraîtra excessive : nous nous contenterons de leur répondre que la gratification annuelle accordée aux mineurs de la Vieille-Montagne n’est pas moins forte, et que l’on a vu des ouvriers intelligens et laborieux élever leur dividende jusqu’à 700 francs, ce qui n’a pas empêché les actionnaires de sextupler leur mise de fonds.

Ce n’est pas sans raison que nous avons exposé le plan d’une vaste entreprise ; cet exemple était nécessaire pour tirer la discussion des généralités vagues, et introduire le public français dans la réalité des affaires coloniales. De ces détails minutieux, qu’on nous pardonnera sans doute, il doit ressortir un double enseignement. A voir tout ce qu’il faut de ressources, de combinaisons commerciales, d’efforts harmonieux, pour attaquer avec avantage la nature africaine, on se représentera la triste figure du petit colon subventionné, du propriétaire isolé et nécessiteux, et l’on apprendra à ne pas trop compter, pour le peuplement de l’Algérie, sur la petite culture et sur la spéculation individuelle. Après avoir reconnu que la colonisation exige les grands travaux d’ensemble,

  1. En ajoutant aux familles ouvrières le personnel administratif et militaire, les auxiliaires, les passagers, etc.