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Page:Revue des Deux Mondes - 1847 - tome 18.djvu/566

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elle est une source d’inquiétudes, de débats sur l’avenir même de la constitution fédérale. Les états du sud se plaignent hautement des attaques qui ont retenti, dans la dernière session du congrès, contre leurs institutions, et, parmi ces institutions, ils mettent au premier rang l’esclavage. Ainsi, récemment à Charleston, il s’est réuni une grande assemblée tant pour adopter certaines résolutions politiques que pour faire honneur à M. Calhoun à son retour de Washington. Quand l’assemblée eut entendu le rapport de son comité et voté par acclamation les résolutions qui lui étaient soumises, M. Calhoun, après avoir donné à ces votes une entière approbation, a signalé avec véhémence l’esprit d’agression des états du nord et les dangers de leur prépondérance. M. Calhoun a démontré qu’au prochain congrès les états sans esclaves auront partout la majorité. Par l’addition des états d’Iowa et de Wisconsin, la majorité sera de 4 voix dans le sénat du côté des états ennemis de l’esclavage. Dans la chambre des représentans, cette majorité sera considérable. Il faut donc que le sud se montre prêt à maintenir ses droits, qui se confondent avec le principe même du respect de la constitution. D’ailleurs, le nord n’a pas d’intérêt à détruire l’esclavage, qui est pour lui au contraire une source de richesses. Sans le riz, le coton, le tabac du sud, que deviendraient le commerce et la navigation du nord, ses usines, ses manufactures ? que deviendrait enfin sa population ? Le revenu du gouvernement tomberait à 8 millions de dollars, et la prospérité des villes du nord diminuerait d’une manière sensible. Celles-ci sont donc vraiment intéressées à respecter les droits et les institutions du sud. On peut juger si une pareille argumentation a été couverte d’applaudissemens. M. Calhoun a partagé en trois classes ceux qui, dans les collèges électoraux, votent contre l’esclavage. Il y a, d’abord les abolitionnistes. Ce sont, aux yeux de M. Calhoun, des fanatiques qui regardent l’esclavage comme un crime et en veulent la destruction à tout prix. Les abolitionnistes forment un vingtième des électeurs. Viennent ensuite des gens plus modérés et plus tranquilles, qui, tout en regardant l’esclavage comme un mal, ne voudraient pourtant pas, pour l’abolir, violer la constitution. Ils forment le vrai parti conservateur des états du nord et représentent les sept-dixièmes des électeurs. Quant à la troisième fraction de la population électorale, M. Calhoun la subdivise en deux parties ; l’une présente des hommes de talent et d’éducation, dont le nombre ne s’élève qu’à un vingtième des électeurs, tandis que l’autre forme un cinquième du corps électoral, et est composée de gens qui appartiennent à ce qu’on appelle le parti des dépouilles (spoils parly), gens qui ne reconnaissent aucun principe, et qui ne se mêlent d’élections que pour obtenir leur part du butin. M. Calhoun a fait observer que l’égalité de forces qui, la plupart du temps, règne entre les whigs et les démocrates, donne dans les élections une grande importance aux abolitionnistes, malgré le petit nombre de ces derniers, qui se trouvent recherchés par l’un et l’autre parti. Il faut donc, suivant l’orateur, que le sud oppose une énergique résistance aux attaques et aux dangers qui le menacent. M. Calhoun a protesté de son attachement à l’union, mais il a ajouté que l’union serait infailliblement sacrifiée, si les droits du sud étaient envahis. Défendre les institutions du sud, c’est travailler au maintien de l’union. Le discours de M. Calhoun a produit une sensation profonde, non-seulement à Charleston, mais dans tous les états du sud.

Au début, la guerre du Mexique n’était pas populaire dans le sud ; plus tard,