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Page:Revue des Deux Mondes - 1847 - tome 18.djvu/669

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pas de longue durée. Après un moment de stupeur, le palais compta le nombre et la valeur des hommes sur lesquels il pouvait s’appuyer. Il y avait d’abord toute la faction Cabral, qui se composait des employés appelés dans les bureaux par l’administration précédente, personnel nombreux dont on fait à l’occasion une milice compacte et dans laquelle n’entre aucun élément étranger ; — ensuite les partisans de la charte octroyée par dom Pedro dans des circonstances où il avait trop d’intérêts à ménager pour faire du premier coup une constitution sur laquelle il n’y eut plus à revenir : admirateurs obstinés du pouvoir quasi-absolu, peu confians dans les hasards d’une révolution ; — enfin, les maréchaux, qui, sans ressentir peut-être une animosité bien grande contre la charte de septembre, n’aiment pas non plus à voir les questions de principes l’emporter dans le conseil et la pensée dominer l’action. Ces généraux influens, ce sont le duc de Terceira et le marquis de Saldanha ; tous les deux ils signèrent à Évora, en 1834, l’acte d’abdication que dom Miguel vaincu fit remettre entre leurs mains ; tous les deux ils semblent vouloir concentrer le plus de pouvoir possible autour de cette reine encore jeune qu’ils ont couronnée enfant. Nés dans un autre temps, peu rassurés sur l’avenir qui leur échappe, ils regardent ce trône à demi constitutionnel comme leur propre ouvrage, et puis enfin ils aiment le pouvoir, qui, dans des circonstances difficiles, leur a été confié avec le commandement des troupes. Habitués à être obéis, on les a vus, en restaurer de concert cette même charte inaugurée de nouveau par la cour. A la tête de ce parti connu sous le nom de chartiste, il faut bien placer le roi dom Fernando, à qui l’on reproche dans l’opinion publique de céder à l’influence de M. Dietz, son ancien précepteur. Ni le professeur allemand ni son royal élève ne sont populaires à Lisbonne ; la Péninsule, on le sait, n’a jamais vu les étrangers d’un bon œil. Les journaux portugais lancent à la face du Dietz, — o Dietz, comme ils l’appellent, — ce qu’ils n’osent dire au roi en personne.

Cependant le ministère Palmella faisait de son mieux ; les travaux des routes avaient été repris ; une douzaine d’ouvriers équarrissaient les pierres destinées à la prolongation du quai, on entendait même retentir le marteau sous les échafaudages de l’arc de triomphe qui doit compléter les embellissemens de la grande place ; mais il y avait une double partie engagée : d’une part, la banque aux abois demandait à la cour une aide que celle-ci lui refusait ; d’autre part, le ministère préparait les élections, qui devaient, selon toute probabilité, consacrer son existence et lui donner un véritable point de départ. La charte de dom Pedro a conservé le système des élections à deux degrés ; les petits électeurs nomment les grands, qui à leur tour choisissent les députés. La première de ces deux épreuves eut lieu en septembre 1846. Les réunions se firent par paroisses, dans les églises, selon l’usage, et