Aller au contenu

Page:Revue des Deux Mondes - 1847 - tome 18.djvu/946

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.


Séparateur


31 mai 1847.

Serait-ce parce qu’il n’y a point d’émotions politiques dans le pays qu’on aborde aujourd’hui les affaires avec une sorte de turbulence inquiète ? La chambre arrive aux études et aux réformes administratives avec plus d’agitation que d’expérience ; sur ce point, il faut le dire, tout le monde a un peu son éducation à faire, le pays comme le gouvernement, les partis et les hommes. À cet égard, nous pourrions envier à nos voisins, à nos rivaux, la manière large et simple dont ils procèdent, la résolution avec laquelle ils envisagent les plus grandes affaires, la promptitude décisive avec laquelle ils les mènent, enfin l’esprit d’ensemble, les habitudes de discipline qu’on remarque dans les rangs du parlement anglais. Ces qualités indispensables, nous parviendrons à les contracter, et il serait puéril d’imaginer que la France est incapable d’accomplir ces nouveaux progrès, si nécessaires à la pratique complète du régime représentatif. Seulement, jusqu’ici, nous montrons plus de bonne volonté que de savoir-faire. L’initiative qui, depuis 1830, appartient à chaque membre du pouvoir législatif, à chaque député, a été exercée avec plus de zèle que de réflexion. Chacun a voulu s’en servir d’une manière isolée, dans l’intérêt de sa situation. Nous ne nierons pas que cet abus de l’initiative peut être aussi imputé à l’excessive timidité qu’a montrée le gouvernement dans des circonstances où il aurait dû devancer les novateurs, les satisfaire dans leurs prétentions légitimes en prenant le pas sur eux, au lieu de les suivre à regret, ou de les combattre avec désavantage. Plusieurs fois dans la sphère officielle, on a manifesté trop d’effroi, trop de répulsion pour des changemens, pour des réformes appelés par les instincts du pays. C’est un tort. Les vues et les projets d’améliorations ne doivent pas être accueillis comme on ferait de symptômes et de tentatives révolutionnaires. En présence de cette attitude du pouvoir, l’initiative parlementaire a multiplié ses propositions et ses entreprises ; des luttes se sont engagées non-seulement entre des membres de l’opposition et le gouvernement, mais dans les