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Page:Revue des Deux Mondes - 1847 - tome 19.djvu/113

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mais aussi ne l’exagérons pas, et surtout cherchons les vrais remèdes. L’opposition seule peut croire que la morale publique serait vengée et assurée par un changement ministériel.

La question de l’existence du cabinet a été vaguement posée pendant le cours de la session qui va finir. Nous ne doutons pas qu’elle ne se pose plus nettement pour tout le monde pendant le cours de la session prochaine. Comment sera-t-elle résolue ? Cela dépend beaucoup de la manière dont le cabinet emploiera l’intervalle qui va s’écouler entre les deux sessions, et de l’attitude qu’il prendra à la prochaine ouverture du parlement. S’il abordait les débats de l’adresse de 1817 comme il a abordé ceux de cette année, nous le croirions fort compromis. S’il se présente au contraire devant les pouvoirs publics fort de son unité désormais assurée, avec un plan de conduite fermentent arrêté, offrant à leur approbation, sur les questions aujourd’hui pendantes des solutions précises et mûrement étudiées, nous ne craindrons rien pour lui. Son sort est dans ses mains.

Quant au parti conservateur, son sort aussi est dans ses mains. Il est en train de subir une profonde modification ; il entreprend un rôle nouveau que l’opinion publique lui impose. Il avait été jusqu’à présent organise pour la lutte et pour la résistance ; les nécessités de la défense lui avaient surtout servi de point de ralliement. La guerre était rude ; il a dû se conduire pendant nombre d’années comme on se conduit en temps de guerre, parant aux dangers les plus pressans, occupé surtout de préserver sa vie, de faire face partout et toujours à ses ennemis. Aujourd’hui ses ennemis sont vaincus, son triomphe paraît définitif. Il s’agit pour lui de se mettre, pour ainsi dire, sur le pied de paix, non pas pour demeurer oisif, doucement absorbé par la jouissance de ses conquêtes, mais pour développer les féconds élémens d’activité qu’il contient en lui-même. Ce n’est pas là l’œuvre d’un jour, mais un travail de longue haleine, que la majorité et le ministère doivent entreprendre ensemble, qu’ils doivent mener résolûment à bien, dont le succès importe à leur salut et à leur honneur. Les obstacles auxquels ils doivent s’attendre ne viendront pas tous du dehors, et les plus incommodes ne seront pas ceux qui sortiront du camp de leurs adversaires.

Qu’on se rappelle le sort du cabinet du 11 octobre. Comme le ministère actuel, ce cabinet, fortement constitué, avait duré long-temps. Il avait signalé son existence par ses victoires contre l’opposition ; comme lui, il avait remporté dans les élections un avantage éclatant ; il semblait hors de tout danger en 1836, et cependant il a péri. D’où sont venus les premiers coups ? quelles ont été les causes ou plutôt l’occasion de sa chute ? Personne ne devrait l’avoir oublié. Les premiers coups, ce sont des mains amies qui les ont portés, et la raison de sa chute, c’était