Aller au contenu

Page:Revue des Deux Mondes - 1847 - tome 19.djvu/15

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

une inclinaison d’environ trente-deux degrés. Telles sont les diverses parties que la science moderne distingue dans le massif de l’Etna ; mais il est une autre division depuis long-temps adoptée qui se prête plus commodément au récit d’un voyage, et due nous suivrons d’abord. Celle-ci admet l’existence de trois zones ou régions concentriques et bien faciles à distinguer. La première comprend le terre-plein bombé ; on l’appelle la région cultivée, regione colta, regione piemontese. Elle est célèbre par la fertilité du sol, par la beauté du ciel et la salubrité du climat. Depuis les premiers temps historiques jusqu’à nos jours, de nombreux et riches cultivateurs n’ont cessé de se presser sur cette partie du sol. On compte sur cet étroit espace soixante-cinq villes ou villages, renfermant une population d’environ trois cent mille ames[1]. La seconde zone porte le nom de région boisée, il bosco, regione sylvosa. Elle a dû son nom aux épaisses forêts qui l’ont autrefois couverte et qui ombragent encore aujourd’hui quelques-unes de ses parties. La région boisée comprend les talus latéraux et une portion de la gibbosité centrale de l’Etna. Enfin, à partir du Bosco, s’étend jusqu’au sommet la troisième zone connue sous le nom de région déserte, regione deserta, regione netta. Cette dernière n’est en effet qu’un vaste désert où luttent sans cesse le feu qui couve sous les rochers de la montagne et la neige qui pendant presque toute l’année en couvre le sommet et les flancs[2].

Plus de deux cents éminences coniques de hauteurs variables, la plupart de forme très régulière, et creusées dans leur intérieur d’une cavité en entonnoir, sont disséminées depuis les limites extrêmes de la région cultivée jusqu’au Piano del Lago. Ces cônes parasites sont autant de soupiraux par où les feux souterrains se sont fait jour à diverses époques. L’origine du plus grand nombre se perd dans la nuit des temps anté-historiques, mais tous appartiennent à l’époque géologique actuelle et semblent être uniquement formés de cendres et de scories. La plupart sont répartis dans la région boisée et élèvent bien au-dessus des arbres leur cime tantôt verdoyante, tantôt nue, selon que leur formation remonte à une époque plus ou moins reculée. Ces volcans secondaires deviennent plus rares à mesure qu’on s’élève davantage, et un très petit nombre seulement se sont formés près du sommet. Ce mode de répartition des cônes parasites concorde pleinement avec ce qu’on observe pendant les éruptions. Il est assez rare de voir le grand cratère entrer seul en action. En s’élevant pour atteindre à l’embouchure

  1. G. Gemellaro.
  2. Scit nivibus servare fidem, pariterque favillis. (CLAUDIEN.)
    Summo cana judo cohibet, mirabile dictu,
    Vicinam flammis glaciem, aeternoque rigore
    Ardentes horrent scopuli. (SILIUS ITALICUS.)