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Page:Revue des Deux Mondes - 1847 - tome 19.djvu/184

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remuant, crédule ; il échappe souvent au ridicule par l’irrésolution et l’impuissance ; il s’efforce même de porter un peu de bon sens dans un système absurde, un peu de dignité dans une situation humiliante, même une sorte de patriotisme dans une politique qui tend à l’oppression de la France par la main de l’étranger. Il n’apparaît point dans ses lettres, il s’en faut, comme un esprit supérieur ni comme un grand caractère ; mais, au milieu de ses illusions et de ses préjugés, il garde une prudence pratique qui l’empêche de se conduire comme il pense et d’être aussi insensé que ses opinions.

Toutefois ses efforts continuels et variés pour échapper aux impossibilités humiliantes dont il est entouré n’aboutissent qu’à prouver qu’il représente une cause perdue. L’inaction absolue est quelquefois la seule digne attitude que laisse l’infortune, et il faut savoir reconnaître l’irrévocable quand il se manifeste. Il y a des événemens qui portent gravée sur le front l’inscription du Dante, et laisser l’espérance est quelquefois l’acte le plus courageux de la raison ; mais ce n’est pas d’ordinaire ainsi que les hommes savent juger leur destinée. La raison ne leur vient qu’à l’aide du découragement, et la résignation qui serait la preuve d’une fermeté clairvoyante n’est le plus souvent que le témoignage tardif et désespéré de la faiblesse.

D’ailleurs, il faut le redire, Louis XVIII fut heureux, car l’empereur fit la campagne de 1812.


CHARLES DE REMUSAT.