« Tous en commun tenaient des coupes et faisaient des libations, et souhaitaient toute sorte de bonheur à l’époux. »
Mais c’est toujours à l’amour qu’elle revient :
« Faites venir le beau Ménon, si vous voulez que vos banquets me plaisent. »
Quelquefois, à travers ces fragmens si courts, on suit le développement de la passion comme dans un drame.
« Je vais chanter pour ma bien-aimée un agréable chant.
- « … Allons, ma lyre divine, parle et prends une voix.
« La cigale secoue de ses ailes un bruit harmonieux, quand le souffle de l’été, volant sur les moissons, les brûle.
« Je retourne mes membres sur ma tendre couche ;
« La lune s’est plongée dans la mer,
« Et avec elle les pléiades ; — la nuit est à son milieu,
« L’heure passe,
« Et je suis couchée solitaire !
« L’amour, qui brise les membres, vient de nouveau m’agiter, serpent doux et cruel qu’on ne peut soumettre ! Atthis, tu hais mon souvenir et tu voles chez Andromède !
« Ne dédaigne pas ces réseaux de pourpre que j’ai fait venir de Phocée, don précieux que je dépose à tes genoux.
« Andromède a été bien récompensée de ses prières !
« Sappho, pourquoi implorer la puissante vénus ?
« Je ne crois pas que mes chants touchent le ciel, le ciel est sourd. »
N’est-ce pas là l’expression douloureuse de la passion ? n’est-ce pas là une insomnie pareille à celle de Didon ?… Après ces dernières paroles, on sent un découragement profond ; elle se tait, ce semble, pendant quelques instans ; à peine laisse-t-elle échapper des mots brisés qui pourraient être ceux que nous retrouvons çà et là : « Mon souci !… » « C’est le secret de mon cœur !… » Elle veut se taire, mais bientôt un cri de douleur lui échappe de nouveau : « Je t’aimais, Atthis, autrefois ! » Ce dernier mot, πάλαι ποτά, dans le tour grec, est d’un effet naïf et passionné.
« Tu m’oublies ! ou tu aimes un autre que moi entre les mortels ! »
« Puissent les vents emporter le souci qui m’accable ! »
Alors, jetant un regard en arrière, elle se reporte aux premiers temps de cet amour, elle repasse avec mélancolie sur les traces d’un bonheur qui n’est plus :
« Je la vis qui cueillait des fleurs, c’était une toute jeune fille… De molles guirlandes entouraient son beau col. »
Mais elle s’arrache brusquement à ce souvenir si plein d’amertume ; elle se met à regarder dédaigneusement la rivale qu’Atthis lui préfère ;