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Page:Revue des Deux Mondes - 1847 - tome 19.djvu/397

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militaire des Mexicains. Il ne put s’empêcher de traiter avec un certain dédain des cavaliers qui n’avaient jamais su se former en rang, et qui, pour manier leurs chevaux, se trouvaient dans la nécessité de renoncer à leurs armes. Les journaux de Mexico ne manquèrent pas non plus de s’égayer aux dépens de la cavalerie américaine ; ils flattaient ainsi l’orgueil national, car, pour le Mexicain comme pour l’Arabe, la première qualité d’un homme est d’être bon cavalier. On le voit, les deux armées, au moment d’entrer en lutte, étaient animées de dispositions bien différentes. Le général Mejia croyait n’avoir affaire qu’à des ennemis peu redoutables. Le général Taylor s’était rendu compte de toutes les difficultés de sa position ; il les acceptait, il les subissait sans impatience comme sans faiblesse.

Les derniers jours du mois de mars étaient arrivés au milieu de cette attente si diversement supportée des deux parts. Les Américains commençaient à pousser de nombreuses reconnaissances sur le territoire mexicain. Leur intention de se déplacer et de donner ainsi le signal des hostilités sérieuses était enfin évidente. Bientôt on sut d’une manière plus certaine qu’ils se proposaient de franchir le 22 mars une petite rivière, appelée Arroyo-Colorado, pour s’avancer sur la rive gauche du Rio-Bravo, dans l’état de Tamaulipas. Cette nouvelle fut transmise au général Mejia par le lieutenant Falcon, qui, à l’appui d’une si précieuse révélation, remit entre les mains de son chef deux dragons américains tout montés et tout équipés, faits prisonniers dans sa dernière reconnaissance.

La nouvelle apportée par le lieutenant se vérifia avec une parfaite exactitude. L’armée ennemie s’avança d’abord jusque sur la rive gauche du Rio-Bravo del Norte, et par conséquent sur le territoire même de l’état de Tamaulipas. On sait déjà que Matamoros, capitale de l’état, est située à l’embouchure et sur la rive droite du même fleuve, à onze lieues de la mer. L’armée américaine s’était partagée en deux corps. Le 22 mars 1846, la plus petite de ces deux divisions, sous les ordres du général Taylor, alla camper sur le bord de la mer, près d’un promontoire nommé le fronton de Santa-Isabel. Cette nouvelle position lui permettait de communiquer avec une escadre composée de quatre bateaux à vapeur et de sept bâtimens, qui stationnaient à l’embouchure du Rio-Bravo. S’il restait encore au général américain quelque illusion au sujet des sympathies qu’il croyait rencontrer dans la population mexicaine, sympathies que repousse, quoi qu’on puisse dire en Europe, la différence des deux races, cette illusion dut se dissiper complètement, car il ne campa qu’au milieu des débris encore fumans des maisons et des cabanes abandonnées par les habitans.

Le second corps, sous les ordres du général Worth, alla se poster près de Matamoros, devant un des points guéables du Rio-Bravo nommé