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de résigner ses fonctions de secrétaire d’état de l’intérieur. Il y fut remplacé, le 17 janvier 1822, par le jeune Robert Peel, que l’on considérait, dès cette époque, comme l’un des membres les plus éminens de la chambre des communes, et sur qui il fondait les plus grandes espérances pour l’avenir du parti tory. Ces espérances se fussent certainement changées en un sentiment de terreur et de désespoir, s’il eût prévu la moindre partie des réformes dont son successeur devait prendre l’initiative ou poursuivre le développement.

Sur les instantes prières du roi et de ses ministres, lord Sidmouth, en déposant ses fonctions actives, consentit à rester dans le cabinet sans département et sans emploi spécial. Il refusa le titre de comte que le roi voulait lui conférer, mais il accepta une pension de 3,000 livres sterling, à laquelle il renonça quelques années après, lorsqu’un héritage considérable lui fit penser qu’il n’avait plus besoin des secours du trésor public pour soutenir convenablement son rang. Cette résolution, entièrement spontanée, lui fit un grand honneur.

Veuf depuis long-temps, il épousa, à soixante-six ans, quelques mois après sa démission du ministère de l’intérieur, la fille d’un ancien ami, bien plus jeune que lui, quoique également veuve. Il trouva dans cette seconde union le bonheur que la première lui avait déjà donné, et, depuis cette époque, il passa à la campagne la plus grande partie de son temps, tout entier aux douceurs de l’existence de famille, qu’il animait par des œuvres de bienfaisance et par les plaisirs de l’étude. Loin de regretter les affaires, comme tant d’autres hommes d’état, qui, les ayant volontairement quittées sous l’influence d’un dégoût passager, ont bientôt senti amèrement le vide et l’insupportable fatigue de l’oisiveté, il ne tarda pas à rompre le dernier lien par lequel il tenait encore à la vie officielle ; il cessa de faire partie du cabinet, où on s’efforça vainement de le retenir. Ses nouvelles habitudes ne lui permettant pas d’assister régulièrement aux séances du conseil, sa conscience, disait-il, lui interdisait de continuer à y figurer nominalement.

Suivant toute vraisemblance, ce scrupule apparent cachait la désapprobation ou tout au moins l’inquiétude défiante que lui inspiraient les erremens nouveaux dans lesquels le gouvernement commençait à marcher. Lord Sidmouth avait à peine cessé de diriger le département de l’intérieur, que celui des affaires étrangères avait aussi passé en d’autres mains. Lord Londonderry (lord Castlereagh) ayant mis fin à ses jours dans un accès d’aliénation mentale, on lui avait donné pour successeur ce même Canning qui, trois fois déjà, soit comme ministre, soit comme ambassadeur, s’était associé à l’administration des tories, mais qu’une sorte d’incompatibilité réciproque, provenant de l’indépendance de son caractère et de ses opinions, avait toujours empêché d’y prendre solidement racine. Soutenu cette fois par le mouvement de l’esprit public et