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Page:Revue des Deux Mondes - 1848 - tome 23.djvu/289

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on a emprunté en deux fois 200 millions à la Banque, et on a aliéné pour gage de ces emprunts les prêts à l’état.

Le grand cheval de bataille de M. Garnier-Pagès, c’est la dette flottante. Le fameux rapport l’évaluait à 870 millions, et M. Lacave-Laplagne ne conteste pas ce chiffre. C’est ici que M. Benjamin Delessert vient au secours de l’ancien ministre des finances et complète la démonstration, déjà fort avancée par celui-ci. La dette flottante avait été élevée sans doute à des proportions considérables, à cause de l’énorme dépense des chemins de fer, mais elle avait atteint son maximum au commencement de 1848 ; elle tendait à décroître par les rentrées successives de l’emprunt du 1er novembre dernier et par les remboursement des compagnies de chemins de fer. En quelques années, elle serait rentrée dans des limites plus étroites. La dette flottante se divise d’ailleurs en deux parties bien distinctes, qu’il importe de ne pas confondre quand on veut se rendre un compte exact de la position du trésor : c’est 1° la dette à échéance déterminée, celle des bons du trésor exigibles à des dates fixes et connues d’avance ; 2° la dette flottante à échéance indéterminée, dont le capital tend, par sa nature, à rester en perpétuité entre les mains de l’état, tant que l’état mérite crédit, mais qui est néanmoins exigible à bref délai, pour une partie du moins : ce sont les fonds des communes et des caisses d’épargne. Or, pour ces derniers fonds, au lieu d’être réclamés par les déposans, ils affluaient, au contraire, dans les caisses de l’état, tant l’état inspirait de confiance, et, pour les bons du trésor, le paiement à l’échéance était assuré.

Voici quelles étaient, d’après M. Delessert, les ressources du trésor le 24 février : 135 millions écus, 60 millions en portefeuille, plus 20 millions à recevoir en avril de la compagnie du chemin de fer du Nord, plus 9 millions par mois des versement de l’emprunt ; en tout, pour une période de trois mois, par exemple, 242 millions de ressources extraordinaires, en dehors des rentrées de l’impôt, qui étaient d’environ 100 millions par mois, et sans compter sur les renouvellemens des bons du trésor. Voici maintenant quels étaient les besoins extraordinaires pour cette même période de trois mois : 18 millions de bons du trésor échéaient en mai, 50 millions en avril et 40 millions en mars, en tout 108 millions d’échéances en présence de 242 millions de ressources. Le semestre du 5 pour 100 qui échéait en mars était couvert, et au-delà, par l’excédant, sans rien demander aux recettes ordinaires de l’impôt, qui restaient disponibles pour toutes les autres dépenses, et sans rien attendre des renouvellemens des bons du trésor, qui étaient cependant abondans et approximativement égaux aux extinctions, puisqu’on en avait réduit l’intérêt à 4 pour 100. Il est donc évident pour tout homme de bonne foi que tous les services étaient parfaitement assurés pour ces trois mois, et, par suite, pour l’année entière, puisque ces trois mois étaient les plus chargés de l’exercice, à cause de l’échéance simultanée des bons du trésor et des rentes 5 pour 100.

M. Delessert ne se borne pas à réfuter victorieusement cette accusation de banqueroute jetée par M. Garnier-Pagès au gouvernement déchu avec une légèreté si coupable. Il retourne l’accusation contre M. Garnier-Pagès lui-même et contre le gouvernement provisoire, et c’est ici qu’il importe de suivre l€S chiffres de près. D’après M. Delessert ; même après la révolution de février, quand les remboursement des compagnies des chemins de fer jdi les versement de l’emprunt