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Page:Revue des Deux Mondes - 1848 - tome 23.djvu/354

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DE


LA GUERRE SOCIALE


DANS SES RAPPORTS AVEC LA PHILOSOPHIE PANTHÉISTE ET LE MOUVEMENT


RÉVOLUTIONNAIRE DE l’EUROPE.




Je rencontrai, près du chemin de fer du Nord, à Paris, le 28 juin au matin, l’un de mes plus estimables amis et l’un des plus étranges ; du moins il aurait passé pour tel dans un autre temps. Sa barbe est singulière, taillée dans des proportions bizarres et peignée avec une recherche que les fats du XVIe siècle auraient approuvée ou enviée ; son costume est peu d’accord, par la coquetterie habituelle de l’ajustement, avec la profusion presque farouche de cette barbe ondoyante et nuancée ; son discours facile, plein de grâce et d’onction, éclairé de souvenirs historiques, atteste une nature poétique et un esprit orné. On ne peut imaginer d’ame plus délicate ni de penchans plus généreux. Mille traits de sa vie me l’ont fait aimer, et quand je l’écoute développant, avec cette faconde qui semble convaincue, ses théories mystiques et législatives, il me semble que Philon ou Jamblique, les vieux rêveurs alexandrins, m’apparaissent vivans. Enfin, c’est une intelligence à étudier et un très honnête homme. Son malheur est d’être dieu.

Je l’ai dit, ce n’est pas un sot, un fou encore moins ; il est de son temps. C’est par sincère amour pour notre espèce, sans arrière-pensée