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Page:Revue des Deux Mondes - 1848 - tome 23.djvu/890

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dans les dépenses du service courant[1]. Ainsi voilà 2 milliards et demi de dépenses extraordinaires effectuées dans ces dix-sept années, 2 milliards et demi qui profitent, pourrait-on le nier ? à la grandeur, à la prospérité de la France, et, en regard de cette somme énorme, de quelles charges nouvelles la France est-elle grevée ? On l’a vu : d’un capital dont l’intérêt s’élève à peine à quelques millions de rente.

D’où vient cette disproportion ? Comment, en liquidant ses comptes, le gouvernement de ces dix-sept années trouve-t-il une telle balance en sa faveur ? C’est qu’il a fait ce qu’aucun autre gouvernement avant lui n’avait même essayé : il a soldé sans cesse sur ses ressources ordinaires les dépenses extraordinaires dont il dotait le pays. Cette guerre lointaine et dispendieuse, entretenue pendant dix-sept ans sur une longueur de deux cents lieues de côtes, c’est sur ses budgets ordinaires qu’il l’a payée ; et si, pour exécuter en partie ses grands travaux publics, il a eu recours au crédit, ce n’est qu’en apparence, pour ainsi dire, car son amortissement allait s’augmentant chaque année, et cet amortissement, c’est encore sur ses recettes ordinaires qu’il était prélevé.

Maintenant vous demanderez peut-être comment il est parvenu à faire grandir ses revenus annuels jusqu’au point qu’ils couvrissent à la fois toutes les dépenses courantes et la plus grande partie de celles que l’avenir habituellement est seul chargé d’acquitter ? Est-ce en imaginant quelques nouveaux impôts ? est-ce en élevant le taux des impôts existans ? Non, il a détruit des impôts, il n’en a pas créé ; il en a diminué, il n’en a pas augmenté. C’est avec les seuls impôts perçus sous la restauration qu’il était parvenu à obtenir annuellement 330 millions de plus qu’avant 1830. Et comment ? D’abord en respectant les droits, en assurant la sécurité de tous, sous les auspices de la politique la plus réellement libérale qui ait peut-être jamais été pratiquée ; puis, en osant semer pour recueillir, en travaillant résolument à élargir toutes les voies de la prospérité publique, en donnant à la force productrice du pays une énergie toute nouvelle.

Ce n’était donc pas une folle imprévoyance, encore moins le besoin de satisfaire à de misérables intérêts de localité (faut-il ramasser en passant cette pitoyable accusation !) ; ce n’était pas une pensée mesquine et égoïste qui le poussait à encourager ou à exécuter lui-même tant de fécondes entreprises sur notre vaste territoire. Non, c’était cette

  1. Voir à l’annexe n° 4 de la brochure de M. Laplagne le tableau, par ordre d’exercices, de toutes ces dépenses extraordinaires montant à 1,464,000,000 fr. Voir aussi dans le corps de la brochure (page 43 et suivantes) l’énumération de tout ce qui a été fait depuis dix-sept ans avec les ressources ordinaires et extraordinaires confiées aux divers départemens ministériels, et l’appréciation du profit qu’en a retiré le pays.