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Page:Revue des Deux Mondes - 1848 - tome 24.djvu/22

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levards de notre défense nationale. La révolution de février, qui a rendu tant de chances à la guerre, ne doit pas dédaigner ce résultat du premier succès diplomatique de la révolution de 1830.

Le principe de la non-intervention a garanti la nationalité belge ; malheureusement, appliqué à la question polonaise, il ne pouvait sauver l’héroïque nation qui venait de tenter, en 1831, un effort désespéré pour recouvrer son antique indépendance. La voie des remontrances amiables était seule ouverte. La correspondance de l’ambassade de France à Vienne prouve que rien ne fut épargné pour obtenir le concours moral de l’Autriche pour un but de paix et d’humanité ; mais les intérêts particuliers de l’Autriche et la crainte de blesser les susceptibilités de l’empereur de Russie s’opposèrent constamment au succès des démarches pressantes du gouvernement français. Il ne faut pas penser toutefois qu’au milieu des témoignages de sympathie que la cause polonaise rencontrait dans plusieurs provinces de la monarchie autrichienne, en Hongrie principalement, la cour de Vienne et le ministre qui dirigeait ses affaires extérieures restassent complètement indifférens à tant de malheurs et d’intrépidité. Croit-on, dit un jour le prince de Metternich à l’ambassadeur de France, que, comme homme, je puisse être insensible à la vue de tant de courage ? et pense-t-on que, comme ministre, je n’aimerais pas mieux avoir pour voisin une Pologne toujours bienveillante et toujours amie, plutôt qu’une Russie toujours envieuse et toujours envahissante ? Ces paroles remarquables prouvent que dans d’autres circonstances, et s’il eût été possible de séparer la cause des Polonais du principe insurrectionnel qui leur avait mis les armes à la main, le prince de Metternich ne serait peut-être pas resté sourd aux suggestions du cabinet français ; elles s’accordaient d’ailleurs avec le regret souvent exprimé par le même ministre de la facilité imprévoyante avec laquelle l’Autriche, dirigée par M. de Kaunitz, avait, à une autre époque, consenti au partage de la Pologne. Les efforts de notre gouvernement pour entraîner le cabinet de Vienne à une intervention pacifique, soit pendant la lutte, afin d’arrêter l’effusion du sang, soit quand vint l’issue fatale, afin de prévenir l’atteinte dont les traités étaient menacés, ne furent malheureusement accueillis que par des réponses évasives, ou de stériles protestations. La conduite des autorités autrichiennes envers les malheureux Polonais obligés de se réfugier en Gallicie ne fut rien moins que généreuse. Il semblait que la cour de Vienne fût portée à mettre d’autant plus d’éclat dans les témoignages de son zèle pour la cause du czar, qu’elle sentait le besoin de lui déguiser son penchant réel, peut-être même de lui faire oublier certaines démarches moins publiques tentées lors de la dernière campagne de Turquie, et qui n’avaient point échappé à son inquiète sur-