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Page:Revue des Deux Mondes - 1848 - tome 24.djvu/411

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loyale des termes dans lesquels il est conçu : le cabinet de Londres n’admettait pas cette manière de voir et ne se regardait comme lié par les termes du traité que relativement aux îles mentionnées expressément dans l’acte de 1824. Bornéo n’ayant pas été désignée, aucune stipulation du traité ne peut, selon le cabinet anglais, lui être applicable. Cependant, en ce qui touchait à l’établissement de Sarawak, le ministère anglais n’hésitait pas à donner au gouvernement néerlandais l’assurance la plus positive que M. Brooke, comme fonctionnaire britannique, ne se permettrait jamais rien de contraire aux intérêts de la Hollande à Bornéo[1]. Le ministre des affaires étrangères ajouta que le gouvernement néerlandais n’entendait nullement renoncer au principe qu’il déduisait des articles du traité de 1824 (notamment des articles 3[2], 6 et 12), que la négociation roulait sur beaucoup de détails qui pourraient en retarder la solution, et que l’échange des notes continuait entre les deux cabinets. Le ministre des colonies, remplaçant son collègue à la tribune, ne fit que rappeler les principes généraux qui servaient de base à la discussion et exprimer la conviction que la réponse définitive du cabinet de Londres serait satisfaisante.

Depuis le changement de ministère qui a placé le portefeuille des colonies entre les mains de l’amiral Ryk, et donné celui des affaires étrangères au baron Bentinck, nous ignorons quels progrès ont pu faire les négociations, et la réponse définitive du cabinet de Londres ne nous est pas connue ; mais nous doutons fort qu’elle puisse satisfaire le gouvernement hollandais et surtout les états-généraux. A qui la faute, en réalité ? Nous ne pensons pas que l’Angleterre puisse revenir sur les déterminations qu’elle a prises à la face de l’Europe, et retirer à M. J. Brooke (aujourd’hui sir James Brooke) l’approbation et l’appui officiels par lesquels elle a sanctionné les actes de cet intelligent, intrépide et honorable aventurier. Nous souhaitons, pour notre part, prospérité et durée à la petite principauté de Sarawak. De plus, quant au fond de la grande question soulevée par les faits accomplis, nous n’hésitons pas à dire que, d’après le texte du traité, l’Angleterre nous paraît être dans

  1. On sait que M. J. Brooke a été investi par le sultan de Braunie du gouvernement, à titre de fief héréditaire, de la province de Sarawak, et qu’il est en même temps agent du gouvernement britannique auprès du sultan de Bornéo propre. Braunie ou Bournéh (ou Brounai, comme l’écrit M. Melvill de Carnbee) est la corruption du mot varouni, qui désignait autrefois la partie nord de Bornéo. Le véritable nom de l’île entière est Kalémentan. Voyez, au sujet des prétentions anglaises sur Bornéo, la Revue du 15 mai 1846.
  2. « Il est entendu qu’avant la conclusion du présent traité, communication a été faite par chacune des parties contractantes à l’autre de tous traités ou engagemens subsistant entre chacune d’elles respectivement et l’un quelconque des gouvernemens indigènes dans les mers de l’est, et que semblable communication sera faite de tous traités de la même nature qui seraient, à l’avenir, conclus par elles (les hautes parties contractantes) respectivement. (Art. 3 du traité, IIe paragraphe.)