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Page:Revue des Deux Mondes - 1849 - tome 3.djvu/901

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La consommation des boissons s’étend comme celle du sucre et du café, et la population tout entière prend sa part dans le bien-être général[1] ; tout atteste ce bien-être jusqu’à l’augmentation plus lente des produits de l’impôt du sel, qui met en évidence l’accroissement régulier, de cette population qui prospère[2]. Jamais les fruits de l’ordre et de la paix n’ont été recueillis plus abondamment par un grand peuple, et, comme pour montrer avec éclat l’étroite union, de la politique et du bonheur public, le même coup qui a renversé les institutions a bouleversé toutes les fortunes. Un progrès inoui a été suivi d’une décadence sans exemple ; dix-sept ans de règne avaient ajouté 304 millions au revenu de l’état ; 142 millions ont été perdus en dix mois de révolution ; cet appauvrissement du trésor n’a été qu’un faible indice de l’appauvrissement du pays. Nous revoyons des jours meilleurs, et le trésor et le pays travaillent ensemble à réparer leurs pertes ; mais c’est à peine l’ombre du passé, et cependant nous ne serons pas surpris si ces tentatives d’une prospérité qui s’efforce de renaître inspirent plus de joie peut-être, que notre ancienne et longue prospérité, car il est dans notre nature que le sentiment du bonheur s’affaiblisse par sa durée : le bien-être de la santé se sent moins vivement que celui de la convalescence.

Voilà l’histoire des contributions publiques sous la monarchie de 1830 ; parcourons maintenant celle de la dette nationale.

La plus forte part de cette dette a été créée sous la restauration. L’empire s’est peu servi du crédit ; il n’en aimait pas l’usage, il n’en pratiquait pas les deux conditions essentielles, l’exactitude et la bonne foi. La dette perpétuelle de 63 millions qu’il a laissée à sa chute est presque en totalité antérieure à son avènement ; mais il transmit à la restauration la liquidation des dettes qui remontaient à ses victoires et qu’il fallut acquitter après ses revers. La France paya tour à tour l’invasion et l’affranchissement du son territoire. Cette liquidation de nos désastres pèse encore sur nos finances ; plus de 100 millions de notre dette perpétuelle n’ont pas une autre origine. Forcée de subvenir aux intérêts d’une dette si rapidement accrue en si peu d’années, la restauration était hors d’état de payer sur ses recettes ordinaires ses plus petites comme ses plus grandes entreprises ; tous ses travaux publics, toutes ses expéditions militaires, toutes ses mesures politiques ont été payés par des ressources extraordinaires. Elle a construit quelques ponts, elle a continué l’œuvre de la canalisation de la France : un emprunt

  1. De 1831 à 1847, le produit des droits des boissons s’est élevé de 63,441,900 fr. à 101,827,000 fr. ; celui des droits sur le sucre, de 35,757,000 fr. à 65,134-,000 fr. ; celui des droits sur le café, de 7,942,000 fr. à 15,353,000 fr.
  2. De 1831 à 1847, le produit des droits sur le sel s’est élevé de 63,317,000 fr. à 70, 408,000 fr.