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Page:Revue des Deux Mondes - 1850 - tome 5.djvu/116

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et un de leurs meneurs les plus ardens, M. Foote, à l’approche de la session, s’est transporté à Washington pour provoquer des déclarations publiques de la part des représentans et des sénateurs du sud à mesure qu’ils arriveraient à leur poste. C’est ainsi qu’il s’est adressé à deux hommes accrédités dans le parti whig, à M. Mangum, sénateur, et à M. Clingman, député de la Caroline du sud, pour leur demander de se prononcer catégoriquement. M. Clingman s’est chargé de répondre, et il déclare dans sa lettre que la résistance du sud doit être mesurée à la violence de l’attaque ; il demande que les hommes de tous les partis n’hésitent pas à se rallier autour du drapeau commun, et il espère que, « long-temps avant que le péril soit devenu imminent, le sud présentera un front compacte à ses ennemis. »

Voici donc les deux fractions de l’Union américaine arrivées à se traiter d’ennemies, voici que les hommes politiques se réunissent ou s’attaquent, non plus suivant leurs opinions politiques, mais suivant la partie du territoire national qu’ils habitent. M. Van Buren et M. Benton d’un côté, M. Calhoun de l’autre, tous les trois démocrates, montrent les uns contre les autres plus de violence, d’acharnement et de haine qu’ils n’en ont jamais déployé contre les whigs. M. Mangum et M. Clingman, tous deux whigs, dénoncent « comme un acte de tyrannie insultant et brutal » une mesure en faveur de laquelle le whig Webster a épuisé toutes les ressources de son éloquence. N’avons-nous pas le droit de conclure de tous les faits qui précèdent qu’aux États-Unis les questions territoriales tendent à se substituer de plus en plus aux questions politiques, que les divisions géographiques y succèdent aux divisions d’opinions, et que le cri de ralliement des partis sera bientôt exclusivement la défense ou l’abolition de l’esclavage ?

Les hommes du sud disent et croient sincèrement que le maintien de l’esclavage est pour eux une condition non-seulement de prospérité, mais d’existence. Depuis le jour où l’abolitionisme a publié son premier pamphlet, les hommes du sud ont tout subordonné à la défense de ce qu’ils appellent leurs institutions particulières, et leur mot d’ordre a toujours été : Ou l’esclavage tel qu’il est, ou plus d’union. On sait que dans leur bouche ce n’est point une vaine menace, et personne ne doute qu’ils ne soient fermement résolus à s’ériger en confédération séparée, plutôt que de voir porter atteinte à ce qui est la clé de voûte de leur organisation sociale. La transformation qui s’opère aujourd’hui dans les partis aux États-Unis constitue donc à elle seule un immense danger pour la prospérité et pour le maintien de l’Union américaine, puisqu’elle hâte le jour où l’esclavage sera le principal et peut-être l’unique champ de bataille de la politique. Qu’est-ce donc, lorsque l’on considère l’acharnement déployé des deux