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Page:Revue des Deux Mondes - 1850 - tome 5.djvu/933

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Se voyait menacé dans sa vie et son bien,
Où le flot qui venait de submerger le trône
Et d’emporter l’autel ne rencontrait personne
Pour l’arrèter. — Hélas ! fasse le ciel qu’un jour
Nous ne connaissions pas ces maux à notre tour !
La maison Bonaparte allait être pillée :
Les Barbets s’avançaient, — troupe déguenillée
(Ils avaient depuis peu pris ce nom de Barbets
De leur barbe pointue ainsi que leurs bonnets),
Gens de corde et de sac qui, jusque dans les villes,
Brûlaient, assassinaient et violaient les filles ;
Moitié soldats, moitié bandits, nouveaux chouans
Que l’Angleterre avait recrutés dans les clans.
Madame Laetitia, les enfans, la servante,
Le vieux prêtre, étaient donc glacés par l’épouvante.
 Oh ! si Napoléon avait été près d’eux,
Quelle colère aurait brillé dans ses yeux bleus !
Lui qui, près de la mer, jouant avec le sable,
Promettait d’être, un jour, pour le moins connétable,
Et plus tard, à Brienne, écolier grace à Dieu,
Sur la neige traçait des figures de feu !
Mais il était absent, oisif, souffrant, malade.
Nommé tout récemment général de brigade,
Impatient d’agir, il frappait, incompris,
De son, talon de fer le pavé de Paris.
Quant aux amis, — pas un ! ils avaient pris la fuite ;
Tous s’étaient éloignés de la maisons maudite.
Je me trompe pourtant ; en ce pressant péril,
Il leur en restait un. — Celui-là viendra-t-il ?
Chut ! qui frappe ? demande à voix basse, à la porte,
La servante. — C’est moi, répond une voix forte.
Le jeune chef était là, debout. — Mais, avant,
Les chiens s’étaient jetés par terre, en arrivant.

VII


Adieu, ville ; adieu, port, maison sur la colline !
Apprenez le chemin de l’exil, Caroline,
Louis, Jérôme. – Et vous, pauline, êtes-vous là ?
Il faut fuir. — Mais ils n’ont, pour porter la smala,
Hélas ! qu’un seul cheval, leur serviteur unique,
Le vieux Colombo, blanc, comme son nom l’indique ;