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Page:Revue des Deux Mondes - 1850 - tome 5.djvu/970

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femmes de la campagne les enfans abandonnés que l’administration leur confie. Il est facile de voir que presque toutes ces améliorations supposent une augmentation du budget de l’état, des départemens ou des communes, afin de nommer des inspecteurs et de multiplier les inspections, de fournir aux salles d’asile et aux crèches des locaux spacieux et bien aérés, de payer des mois de nourrices et des subventions aux hospices dans lesquels seront rétablis les tours. De même la bonne exécution d’une loi sur le travail des enfans suppose que les familles soient moins dénuées. Ainsi les vues de la commission en faveur de l’enfance impliquent un accroissement dans la richesse de la société ; notons cette conclusion pratique, nous en ferons usage plus tard.

La section du rapport qui concerne l’âge mûr est celle qui offre la discussion la plus forte. Les inconvéniens, les périls extrêmes du droit au travail sont lucidement déduits. L’idée d’institutions de crédit où tout le monde pourrait puiser indistinctement et presque à volonté est chimérique : où est donc le capital que ces institutions auraient à distribuer ? Le rapport fait bonne justice de ce plan avec lequel on a un moment abusé les imaginations populaires. Quant au crédit foncier, il est incontestable que c’est un mot qui a fait naître des illusions, cependant la commission le traite trop sévèrement. Que les associations qui ont fait tant de bien dans l’Allemagne du nord et en Pologne soient, telles qu’elles existent dans ces contrées, inapplicables chez nous, on ne saurait se refuser à le reconnaître. L’Allemagne du nord et la Pologne sont des pays de grande propriété, et c’est principalement pour la petite propriété que, chez nous, le crédit foncier est réclamé. Cependant il ne ressort pas de la nature des choses que l’homme qui offre un gage, aussi solide, aussi impossible à détourner que la terre, n’emprunte qu’à 10 pour 100, ainsi qu’on le voit en France. Un taux aussi élevé de l’intérêt est non-seulement regrettable, mais remédiable.

Les associations d’ouvriers commanditées par l’état ont contre elles une objection invincible : pour les commanditer, l’état n’aurait d’autre moyen que de puiser dans la bourse des contribuables, dont la majorité est pauvre. Prendre aux pauvres pour fournir à une classe de personnes moins nécessiteuses dans beaucoup de cas le moyen de s’élever au rang d’entrepreneurs d’industrie, serait d’une injustice extrême ; le rapport le montre de cette manière saisissante qui est propre à M. Thiers. Les associations de ce genre qui furent constituées avec les 3 millions votés en 1848 ne pouvaient s’accepter que comme des expériences d’économie sociale : comme institutions destinées à se multiplier indéfiniment, il n’y faut pas songer, c’est évident ; mais est-ce là tout ce qu’il y avait à dire sur le principe d’association dans ses rapports avec le travail ?