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Page:Revue des Deux Mondes - 1850 - tome 8.djvu/233

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de forme carrée ou triangulaire. Ces signaux servaient à indiquer aux conducteurs les mouvemens à exécuter : Monter, descendre, avancer, aller à droite, etc. Quant aux conducteurs, ils correspondaient avec le capitaine posté en observation dans la nacelle en étendant sur le sol des drapeaux semblables de différentes couleurs. Ils avertissaient ainsi l’observateur d’avoir « à s’élever, à descendre, etc. » Enfin, pour transmettre au général en chef les notes résultant de ces observations, le commandant des aérostiers jetait sur le sol de petits sacs de sable surmontés d’une banderolle auxquels la note était attachée. On trouvait chaque jour des différences sensibles dans les forces des Autrichiens ou dans les travaux exécutés pendant la nuit. Le général en chef tirait un grand parti de ce moyen si nouveau d’observation. Cinq jours après le commencement de ses opérations, l’aérostat s’élevait à peine qu’une pièce de canon, embusquée dans un ravin, tira sur lui : le premier boulet passa par-dessus, le second passa si près que l’on crut le ballon percé, un troisième boulet passa au-dessous ; on tira encore deux coups sans plus de succès. Le signal de descendre fut donné et exécuté en quelques instans. Le lendemain, la pièce n’était plus en position.

Cependant le général Jourdan se préparait à investir Charleroi, il attachait une importance extrême à l’enlèvement de cette place, qui devait ouvrir la route de Bruxelles. Coutelle reçut à midi l’ordre de se porter avec son ballon à Charleroi, éloigné de douze lieues du point où il se trouvait, pour y faire diverses reconnaissances. Le temps ne permettait pas de vider le ballon pour le remplir de nouveau sous les murs de la ville ; Coutelle se décida à faire voyager son ballon tout gonflé. On employa la nuit à disposer vingt cordes autour de l’équateur du filet ; chacune de ces cordes était portée par un aérostier. On plaça dans la nacelle les deux grandes cordes d’ascension, une toile qui servait à serrer le ballon pendant la nuit, des piquets, des pioches et tout l’attirail des signaux ; le commandant lui-même s’était placé dans la nacelle, qui, suspendue par des cordes, était portée par d’autres aérostiers. On sortit de la place à la pointe du jour, et on passa sans être aperçu près des vedettes ennemies. On voyagea ainsi avec la cavalerie et les équipages de l’armée. Le ballon était maintenu en l’air à une petite hauteur par vingt aérostiers qui marchaient sur les bords de la route ; la cavalerie et les équipages militaires tenaient le milieu de la chaussée. On arriva à Charleroi au soleil couchant. Avant la fin du jour, Coutelle eut le temps de faire une première reconnaissance avec un officier supérieur. Le lendemain, il en fit une seconde dans la plaine de Jumet, et le jour suivant il resta pendant sept à huit heures en observation avec le général Morelot.

Les Autrichiens ayant marché sur Charleroi pour délivrer la place, une bataille décisive fut livrée, comme on le sait, sur les hauteurs de