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Page:Revue des Deux Mondes - 1850 - tome 8.djvu/335

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il est soumis, tandis que le peuple anglais, qui paie des contributions sept fois plus fortes, grace aux ressources de son agriculture, de son industrie, de son commerce et de son crédit, en présence d’une nécessité critique, pourrait doubler son budget.

Ce n’est donc point parce que le budget socialiste nous présente en perspective une dépense de 2 milliards, ou de 55 fr. 55 cent. par individu, que je serais d’avis, sans autre examen, de rejeter cette combinaison dans les catacombes de l’utopie. Je me demande, avant tout, si l’école de M. Pelletier est en mesure de nous rendre assez riches pour qu’une contribution de 55 fr. 55 cent. ne nous pèse pas plus à l’avenir que ne le fait aujourd’hui une contribution de 38 fr. 90 cent. J’examine si les réformateurs radicaux ont inventé des recettes qui couvrent bien réellement les dépenses, et si le revenu public doit s’accroître, à leur signal, comme une marée montante qui n’aurait pas de reflux.

Faisons d’abord le compte des recettes qu’ils suppriment, et voyons comment ils procèdent à la destruction de l’impôt. Le revenu public a été évalué, dans le budget de 1851, en déduisant l’amortissement porté en recette pour ordre, à la somme de 1,296 millions. Là-dessus, le système socialiste retranche :


1° Les quatre contributions directes, dont le produit est encore estimé à 408,000,000 fr.
2° Les droits d’enregistrement et de timbre, avec les additions qu’ils viennent de recevoir, pour 251,000,000
3° Les droits divers, l’impôt sur les biens de main-morte, etc., pour 48,000,000
4° Les produits éventuels du service départemental, pour 17,000,000
5° Les taxes établies sur les boissons 100,000,000
Total général, sauf les fractions 824,000,000 fr.

Voilà donc, pour entrée de jeu, les deux tiers du budget des recettes, le plus clair du revenu public, dont on fait table rase. Le reste va s’absorber dans les monopoles que le socialisme s’efforce d’étendre et de grossir. Ne demandez pas de logique à ce système. En supprimant les droits d’entrée sur les boissons et les octrois, qui sont des douanes intérieures, il conserve les douanes, qui sont des octrois établis contre les produits étrangers. Les boissons cessent d’être imposées ; mais l’on maintient les taxes qui frappent les sucres et les sels, condimens tout aussi nécessaires à l’alimentation de l’homme. Abolir les contributions directes et convertir en monopoles les contributions indirectes que l’on n’efface pas de l’échiquier de l’impôt, voilà l’idée fondamentale dit budget tel que la fantaisie socialiste le construit.