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Page:Revue des Deux Mondes - 1850 - tome 8.djvu/501

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par les prophètes. » Et le nouveau sultan, suivi de la foule des cavaliers, fit son entrée à cheval dans Mascara, n’ayant pour tout trésor qu’un franc noué dans l’un des coins de son haïk. Le lendemain, une contribution de 20,000 boudjous, frappée sur les Juifs et les Mozabites, lui assurait les premières ressources, et depuis lors il plaça sous la protection de Muley-Abd-et-hader tous les actes importans de son commandement, annonçant toujours que le saint les lui avait conseillés dans la nuit.

Les tribus de la province, à l’exception des trois qui avaient nommé le fils de Mahiddin, refusèrent d’abord de reconnaître l’autorité du jeune sultan ; mais son habileté, sa réputation de justice, les audacieuses entreprises qu’il tenta, les amenèrent pourtant bientôt en grand nombre à l’obéissance. Nous avons été nous-mêmes, il faut bien le dire, les principaux instrumens de sa puissance. Le traité Desmichels, en 1834, fut notre première faute. Par ce traité, où nous faisions reparaître en son honneur le titre des anciens kalifes, nous lui fournissions les moyens matériels qui lui manquaient pour asseoir son autorité. Ouvriers, poudre de guerre, armes, tout lui fut donné, et, lorsqu’à la suite de querelles de tribu à tribu il se voyait en deux rencontres battu et presque ruiné par Mustapha-ben-Ismaël et ses Douairs, nous refusions les offres de Mustapha, et nous envoyions de nouveau à l’émir des munitions et des fusils. Le traité de la Tafna vint compléter cette série de fautes, et fit naître chez Abd-et-Kader l’espoir de créer à son profit une nationalité arabe. Lorsque le nouveau sultan des pays musulmans voulut reprendre les hostilités en 1839, les idées d’organisation qu’il avait prises en traversant l’Égypte vers 1828 avaient porté leurs fruits, et il avait une armée régulière, des serviteurs dévoués, des ressources en armes et en munitions, des places de dépôt à la limite du Serssous. Nous voyant alors si lourds et si lents, il croyait que nous ne parviendrions jamais à l’y atteindre. Les espérances de l’émir furent déçues, et nos colonnes, devenues bientôt aussi mobiles que l’ennemi qu’elles avaient devant elles, commencèrent les opérations qui devaient amener sa ruine. Les premiers coups furent portés dans ’la province d’Alger, et ce fut après la campagne de 1840 que le général de Lamoricière eut avec M. le duc d’Orléans une longue conférence, où il exposa et ses idées sur les Arabes et son plan d’attaque. Dans la pensée du général de Lamoricière, la province de l’ouest était la base de la puissance de l’émir ; il venait du Grheurb, c’était dans le Grheurb même qu’il fallait l’attaquer, tout en poussant vigoureusement l’offensive du côté d’Alger. Un mois plus tard, M. de Lamoricière était nommé au commandement de la province d’Oran, et, dès les premiers jours, il commença ces razzias et ces hardis coups de main qui amenèrent le succès de nos armes. « Les beni-Hamer et les Garabas sont mes