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Page:Revue des Deux Mondes - 1850 - tome 8.djvu/710

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La situation fausse des chefs girondins, leur peu d’esprit politique, joint à l’inertie naturelle des classes moyennes, avaient aussi précipité le mouvement fédéraliste vers une fin rapide et humiliante. La bataille de Vernon avait été une déroute plus ridicule encore que désastreuse. Dès le mois d’octobre, Lyon avait ouvert ses portes, et, malgré l’assistance d’une flotte anglaise et d’une armée espagnole, Toulon avait succombé en décembre.

Avant que cette sinistre année fût terminée, la convention, victorieuse de l’Europe et de la France, voyait donc tremblans et enchaînés à ses pieds les soixante départemens qui n’avaient eu contre elle que le vain courage de proclamations impuissantes. À la même époque, ses succès militaires contre l’étranger n’étaient pas moins éclatans que ses victoires à l’intérieur n’avaient été décisives. Le territoire français était délivré, et le territoire ennemi envahi ou menacé sur tous les points ; les victoires d’Hondscoote et de Watignies, bientôt après celles de Turcoing et de Fleurus, avaient rendu partout l’offensive à nos armes ; les Hoche, les Pichegru, les Kléber, les Marceau, les Macdonald avaient, du jour au lendemain, comblé dans le commandement un vide réputé d’abord irréparable, et la campagne de 1794 n’était pas terminée, que la France, par le prodigieux élan de ses armées, avait rompu la coalition européenne aussi complètement qu’elle avait triomphé l’année précédente de la coalition austro-prussienne.

Ce fut pourtant au jour où la nation conquérait par son héroïsme la sécurité de son sol, où le fédéralisme expirait sous ses propres divisions, que la révolution se précipita avec un redoublement de fureur dans une carrière d’attentats tellement atroces, qu’en en constatant l’inutilité politique, on ajoute à peine à l’horreur qu’ils inspirent. Loin de s’abaisser par la victoire de la convention, le thermomètre de la violence s’éleva sensiblement à mesure que descendait celui des périls publics. Le gouvernement révolutionnaire n’avait plus affaire à des ennemis dangereux, mais à des prisonniers désarmés et manifestement impuissans, quand Collot d’Herbois, Fouché, Tallien, Javogues, Couthon, Maignet, Fréron et tant d’autres mitraillaient les villes ouvertes et les populations soumises, organisant le pillage et le meurtre dans des proportions qui n’avaient pas été atteintes au temps des grandes invasions barbares. La Vendée avait cessé de menacer la république, lorsque Carier imagina de noyer les femmes et les enfans, au risque de réveiller par le désespoir le courage au cœur des plus lâches. Joseph Lebon n’appréhendait aucune insurrection dans son proconsulat d’Arras, quand ce tigre repu allait chaque jour, après un repas pris côte à côte avec le bourreau, flairer l’odeur des exécutions.

Ce n’étaient pas des ennemis redoutables que les comités de salut public et de sûreté générale envoyaient chaque matin par charretées à