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Page:Revue des Deux Mondes - 1850 - tome 8.djvu/81

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Newstead, à l’âge où ils ne connaissent pas encore les passions ni les besoins qui les en délieront. Les poètes y sont peut-être plus sujets ; ils le font du moins avec plus d’éclat et de confidens. Il en fut de la déclaration du poète de vivre et de mourir avec Newstead, comme de sa résolution de ne recevoir aucune rétribution pour ses ouvrages. À vingt ans, dans sa satire contre les poètes et les critiques écossais, il s’écriait « Que ceux-là quittent le sacré nom de poètes, qui torturent leur cerveau pour le gain, non pour la gloire ! » Et tout d’abord il refusait 400 guinées d’une seconde édition de sa satire. Plus tard, il abandonnait à un ami le prix de ses premiers manuscrits. Enfin, attaqué directement par son éditeur, qui lui envoie un billet de mille guinées pour le Siège.de Corinthe et Parisina, il lui retourne le billet, disant « qu’il ne peut pas, qu’il ne veut pas l’accepter. » Et il ajoute : « Ce n’est pas dédain pour l’idole universelle, ni surabondance actuelle de ses trésors ; mais ce qui est droit est droit, et ne doit pas céder aux circonstances. » L’éditeur insiste, renvoie les mille guinées, et Byron les garde. Il en accepta successivement vingt-deux mille autres ; enfin l’éditeur qu’il trouvait trop généreux finit par lui paraître serré.

« Pour Oxford et pour Waldegrave, lui dit-il dans une petite pièce épigrammatique, tu donnes beaucoup plus que tu ne m’as donné ; ce n’est pas agir honnêtement, mon Murray.

« Car, comme dit le proverbe : mieux vaut un chien en vie qu’un lion mort. Mieux vaut un lord vivant que deux lords décédés, mon Murray.

« Et si, comme l’opinion en court, les vers se sont mieux vendus que la prose, certes je devrais avoir reçu plus qu’eux, mon Murray.

Et dans une lettre au même : « Vous donnerez à mon homme de confiance toutes vos raisons marchandes : — saison lourde, public mou ; — milord écrit trop, sa popularité décline ; — déduction à faire pour le change, — pertes faites avec milord, — édition contrefaite ; — sévérités de la critique et autres points et sujets de discours dont je lui laisse la réponse à lui qui est orateur. »

La lettre qui refuse les premières offres et la lettre qui craint que les dernières ne soient trop modiques ont été écrites à cinq ans d’intervalle. Voilà le danger de commencer par l’idéal ; on finit par les plus prosaïques des réalités. Disons cependant qu’au fond des deux conduites il y avait de la générosité : c’est pour lui-même que Byron commence par refuser de l’argent ; c’est pour les autres qu’il finit par en demander. Les dernières guinées qu’il tirait ainsi de l’éditeur Murray servaient à équiper des Souliotes pour la défense de la Grèce et à envoyer des bandages et de l’argent aux blessés de Missolonghi.

Je ne pouvais guère visiter Newstead sans être tenté de relire lord