Aller au contenu

Page:Revue des Deux Mondes - 1853 - tome 4.djvu/1216

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

nombre de retours de l’océan a-t-il eu lieu ? Évidemment non. Il y y trop d’eau et trop peu de terre pour que la ruine d’un continent qui s’enfonce sous l’océan puisse faire reparaître à ciel ouvert tout ce qui faisait naguère le fond des mers, et, pour citer des exemples, le sol argileux de Londres n’atteste que deux invasions de la mer. Les premiers débris maritimes sont couverts par des débris d’animaux vivant dans l’air, puis vient une couche marine, puis la couche actuelle en voie de formation avec les êtres vivons actuels, hommes et animaux. À Vienne en Autriche, il y a une couche de plus qu’à Paris d’animaux ayant vécu dans l’air. Ainsi les Anglais actuels ne feront un jour partie que de la deuxième couche fossile, les Français seront dans la troisième, et les Autrichiens dans la quatrième, bien d’autres indices tiennent le même langage à l’observateur. Par exemple, les pierres meulières et certains grès des environs de Paris, qui, dans cette contrée, ne sont recouverts par aucune autre roche, sont, à Vienne, recouverts par une couche additionnelle de terrains plus récens.

La catastrophe qui a donné à la terre, considérée dans son ensemble, l’aspect d’une vaste ruine, a surtout imprimé son mode d’action sur la forme du sol et sur les montagnes. Toutes celles qui ne sont pas volcaniques sont formées de couches rocheuses violemment soulevées par un bord et portées à plusieurs centaines de mètres d’un côté, tandis que de l’autre elles s’enfoncent sous le sol à des profondeurs immenses. Les côtes des continens, dentelées de la manière la plus bizarre, les petites îles qui sont les sommets des montagnes que portaient les contrées englouties par la mer, enfin les mille brisures des pics qui couronnent les chaînes qui partagent les bassins des fleuves, tout porte le cachet d’une catastrophe, et même, chose rassurante, d’une catastrophe très récente ; car évidemment ces catastrophes successives, d’après le témoignage des dépôts qu’elles ont produits, n’ont eu lieu qu’à des intervalles de temps immenses.

Le lecteur est sans doute curieux de connaître une ou deux de ces dates écrites dans les faits physiques, bien entendu que l’âge du monde ne peut être fixé ni à la seconde ni à la minute comme les révolutions des astres, guidés par la loi de Newton. Voici un exemple : j’habite, je suppose, sur la côte méridionale de la France, au milieu des sables du bassin d’Arcachon. J’observe que de temps en temps une violente tempête rejette sur la côte une petite colline longitudinale de sable qui borde la mer. Peu à peu je m’aperçois que le vent d’ouest qui domine en France jetant toujours du côté de la terre le sable qui était du côté de la mer, la petite colline de sable appelée dune marche vers l’intérieur des terres avec un déplacement