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Page:Revue des Deux Mondes - 1853 - tome 4.djvu/301

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confiscation, sous prétexte qu’une aussi grande quantité ne pouvait pas avoir été récoltée dans les colonies récemment affranchies.

En 1786, on entreprit d’acclimater dans la Caroline du Sud une belle espèce provenant des Petites-Antilles, et connue dans le commerce sous le nom de sea-islands ou de georgie-longue-soie. Malgré l’insuccès des premières années, on ne perdit pas courage ; les essais se multiplièrent sans résultats décisifs. Les récoltes étaient insignifiantes : on manquait de bras, bien que l’esclavage existât. À défaut d’auxiliaires pour les manipulations qui suivent la cueillette, une partie des récoltes était perdue : les cultivateurs craignaient de trop produire.

Vers 1794, un homme ingénieux et malheureux comme notre Jacquart, Élie Whitney, du Massachusets, imagina la machine à égrener, c’est-à-dire une espèce de moulin destiné à séparer les précieux filamens des graines auxquelles ils adhèrent. Quoique bien imparfaite alors, cette machine fut un excitant pour la culture. Dès l’année suivante, la réunion de toutes les petites récoltes fournit un total de 3 millions de kilogrammes. Les bonnes graines manquaient ; l’Angleterre ne voulait pas en laisser acheter dans ses possessions de l’Inde et des Antilles. On envoya, disent les documens américains, des agens sur les côtes baignées par la Méditerranée, où le coton était alors beaucoup plus cultivé qu’aujourd’hui, et peut-être que notre Algérie a fourni sa part dans ces semences de la grandeur américaine. En 1799, le général Wade Hampton, de la Caroline du Sud, fait sensation en annonçant qu’il a récolté 600 balles sur 600 acres (environ 300 kilogr. Par hectare). Une émulation décisive éclate sur plusieurs points. En 1801, la récolte est déjà de 18 millions de kilos ; pendant les vingt années qui suivent, elle s’élève progressivement à 80 millions.

À partir de 1820, le prix des terres du domaine public fut abaissé de 26 francs l’hectare (2 dollars l’acre) à 16 francs (1 dollar 1/4 l’acre). On vit aussitôt coïncider les grandes expéditions de coton avec les grands achats de terre. Le prodigieux essor que prend vers le même temps l’industrie américaine facilite de toute manière les opérations du planteur. Au moyen des canaux et des chemins de fer, la denrée franchit à peu de frais de larges distances. Grâce au crédit que les banques prodiguent, les instrumens d’exploitation ne manquent jamais. Des navires sont appropriés au transport des cotons. Sur tous les points d’embarcation, on construit des presses mécaniques pour réduire le volume des balles destinées à l’exportation. Ces établissemens où les marchandises s’accumulent deviennent des espèces de docks prêtant sur consignation, régularisant le courtage entre le planteur et le négociant. Tant de facilités amoindrissent naturellement les frais de production. L’abaissement des prix décourage