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Page:Revue des Deux Mondes - 1853 - tome 4.djvu/763

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En présence de ces embarras, la noblesse du Holstein crut qu’elle pourrait conserver, augmenter même ses anciens privilèges et faire valoir des prétentions qui avaient grandi avec le temps. Il s’agissait dès lors de cette fameuse idée d’un état séparé de Slesvig-Holstein qui devait, disait-on, être indépendant du royaume de Danemark, et suivre tout entier un autre ordre de succession que celui qui régissait le royaume. Le danger avait été prévu par le prédécesseur même de Christian VIII : Frédéric VI avait entamé des négociations avec les grandes puissances intéressées au maintien de l’intégrité du Danemark ; mais il mourut avant qu’elles fussent terminées. Christian VIII continua les négociations, et il publia en 1846 une Lettre ouverte, par laquelle il déclarait que le Danemark, le Slesvig, le Lauenbourg et le Holstein-Glucksbourg, parties intégrantes et inséparables d’un même état, se trouvaient et demeuraient incontestablement soumis à l’ordre de succession agnatique et cognatique à la fois, c’est-à-dire par les mâles et les femmes, proclamé par la loi royale de 1665. Pour la partie gottorpienne du Holstein, il y avait lieu d’espérer, disait-il, que par suite des négociations pendantes et fort avancées déjà, elle passerait au même héritier qui recevrait la première. Malheureusement, pendant qu’il cherchait à désarmer ainsi le sleswig-holsteinisme, Christian VIII, qui avait épousé en secondes noces la fille du feu duc d’Augustenbourg, avait le tort de céder à des influences de famille en confiant d’une manière impolitique le gouvernement des deux duchés réunis à l’un de ses deux beaux-frères. Cette union temporaire du Slesvig et du Holstein sous une même administration ne fut pas une des circonstances les moins favorables au projet des deux princes d’Augustenbourg, au moment où leur ambition était irritée par la publication de 1846. Comme Frédéric VI avait en 1834 opposé aux prétentions de la noblesse holsteinoise l’institution, démocratique dans son principe, des états provinciaux, ce fut alors que Christian VIII songea sans aucun doute à se faire une arme de la promesse d’un gouvernement constitutionnel. Les choses en étaient là quand la révolution de 1848 fit éclater la révolte des duchés et passer le Danemark d’un gouvernement absolu, au moins dans les formes, à un régime constitutionnel basé sur le suffrage universel. Toutefois la constitution nouvelle, promulguée le 5 juin 1849, ne put être appliquée immédiatement au duché de Slesvig, alors en pleine révolte, et cette clause y fut insérée : « Sauf à régler après la conclusion de la paix tout ce qui concerne le gouvernement du duché de Slesvig. »

La guerre contre les duchés se termina, on se rappelle avec quel succès et après quels héroïques efforts. Les Danois méritaient qu’une paix glorieuse et réparatrice leur rendit au moins le duché de Slesvig, disputé, envahi par les Allemands. Voici quelle solution la diplomatie