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Page:Revue des Deux Mondes - 1853 - tome 4.djvu/950

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comment le moyen âge s’inspirera de cette donnée pour la transporter dans le symbolisme architectural et les enseignemens de la vie pratique[1].

Les oiseaux comme les quadrupèdes ont chacun son attribut particulier, sa qualité distinctive et pour ainsi dire sa vertu symbolique. L’aigle, roi comme le lion, occupe le premier rang parmi les habitans de l’air. Fier de son antique noblesse, il tient surtout à conserver la pureté de sa race. Au moment même où ses aiglons sortent de l’œuf, il éprouve leur vertu en les forçant à contempler le soleil. Ceux qui supportent, sans cligner la paupière, les rayons brûlans de cet astre sont regardés comme ses vrais enfans, et il les nourrit avec soin ; mais il rejette comme indignes ceux qui baissent le regard, et il confie à la foulque le soin de leur éducation. Comme le cerf ou le phénix, il peut toujours à son gré recommencer sa vie. Lorsque, vieux et aveugle, il sent défaillir ses forces, il s’élève si haut vers le soleil, que ses plumes se consument et que les ténèbres de ses yeux se dissipent ; puis, quand il s’est ranimé dans la chaleur et la lumière, il se laisse, du haut du ciel, tomber dans une fontaine où il se baigne quatre fois, et d’où il sort régénéré. Le pélican ressuscite ses poussins en les arrosant de son sang. La huppe nourrit ses vieux parens affaiblis par l’âge. La grue, tandis que ses compagnes dorment ou voyagent, fait le guet en tenant une patte en l’air, et dans cette patte une lourde pierre, afin de rester en garde contre les surprises du sommeil ; c’est pour cela que la huppe deviendra l’emblème de la piété filiale, et la grue l’emblème de la vigilance.

Il arrive quelquefois que les mêmes animaux représentent en même temps le mal et le bien. Ainsi le serpent figure tour à tour le démon, la santé, la longévité, l’éternité, le changement des saisons,

  1. Le tableau que nous présentons ici est extrait de traités spéciaux sur la matière. Pour indiquer la source exacte de chaque chose, il eût fallu une note à chaque ligne. Nous devons donc nous borner à donner l’indication des ouvrages que nous avons consultés, en faisant remarquer que les mêmes faits se retrouvent presque partout. Voici quels sont les principaux de ces ouvrages : Institutiones Monasticoe de bestiis ; Hugonis de Sancto Victore opéra. Rothomagi, 1848, in-folio, t. II. p. 394, et seqq. — Barthélémy de Glanvil, De Proprietatibus rerum, reproduit dans le IXe livre d’un des romans d’Alexandre sous le titre de Proprietez des bestes qui ont magnitude, force et povoir en leur brutalités (Bibl. impér., Saint-Germain, 138). — C. Julii Solini Polyhistor. — Sexti Aviti opéra. Paris, 1643, in-4o. — Sancti Isidori opéra. Paris, 1580, cap. XII, De Pecoribus et Jumentis, de Bestiis, etc. — L’Image du Monde, ou le Livre de Clergie (Bibl. impér., supp. franc., n° 660, seconde partie, De la Diversité des gens et des bestes, etc.). — Le Bestiaire Maistre Richart de Fournival (Bibl. impér., La Vallière, 81). — Recueil de figures d’animaux [ibid., Saint-Germain, 114.) - Dans un recueil de Traditions tératologiques de M. Berger de Xivrey (Paris 1836), on trouve réunis aussi quelques ouvrages très curieux, tels que le traité du VIe siècle De Monstris et Belluis, et le texte grec de la lettre d’Alexandre sur les merveilles de l’Inde.