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Page:Revue des Deux Mondes - 1854 - tome 5.djvu/225

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tout le corps germanique. Ainsi il eut dans son amitié ou il prit à son service : sur la frontière sud-est des Pays-Bas, le duc Antoine de Lorraine, Robert de la Marck, duc de Bouillon et seigneur de Sedan, son frère Éberhard de la Marck, prince-évêque de Liège; sur la frontière nord-ouest, le belliqueux duc de Gueldre, auquel offrit de s’adjoindre cette année même le duc de Clèves, de Juliers et de Berg[1] ; dans le voisinage du Rhin, le comte Gerlach d’Isenbourg[2] et le comte Jean de Salm, seigneur de Reiferscheid, de Dyk et d’Alster, maréchal héréditaire de l’électorat de Cologne[3]; vers l’Allemagne septentrionale, le duc de Brunswick-Lunebourg, gendre de l’électeur de Saxe, et le duc Frédéric de Holstein[4], souverain du Schleswig et héritier du royaume de Norvége, tandis que du côté de l’Allemagne méridionale, le duc de Wurtemberg, le margrave de Bade et l’évêque de Strasbourg n’étaient pas éloignés de se mettre à sa dévotion.

Il y avait alors dans le corps germanique un homme très puissant quoiqu’il ne fût ni électeur, ni prince, ni comte, et François Ier ne manqua point de se l’attacher : c’était le fameux Franz de Sickingen. Il appartenait à la plus ancienne noblesse possessionnée des environs du Rhin; ses ancêtres avaient combattu en Italie pour les empereurs souabes, et son père avait été proscrit par l’empereur Maximilien pour avoir soutenu les armes à la main les prétentions de la maison palatine à l’héritage de la Bavière-Landshut. Sickingen avait acquis une importance extraordinaire en Allemagne[5]. Il pouvait à toute heure mettre au service de ses alliés deux mille chevaux bien équipés, dix mille vaillans lansquenets, une nombreuse artillerie, et leur ouvrir les portes de plus de vingt-trois forteresses[6]. D’une bravoure entreprenante, d’un caractère chevaleresque, d’un esprit cultivé, élève de Reuchlin, le chef des érudits allemands, ami d’Ulrich de Hutten, qui fut son compagnon à la guerre, son lecteur pendant la paix, et se fit le chantre poétique de sa renommée de la Moselle à l’Elbe[7], Sickingen aimait les armes et les lettres. Continuateur des vieilles mœurs de son pays, défenseur des idées nouvelles de son temps, il se plaisait dans les hasards des grandes aventures et les

  1. Pièce 48, carton J. 952, pension de 4,000 livres promise en échange de ses services qu’il a offerts.
  2. Ibid. Carton J. 995, pension de 4,000 livres tournois, du 4 avril 1518, et promesse originale du comte de servir François ler, dans le carton J. 952, pièce 7.
  3. Ibid. Pension de 1,200 livres du 10 février 1518.
  4. Ibid. Traité original du 19 mai 1518, avec pension de 4,000 livres.
  5. Vie de Franz de Sickingen, par E. Münch; 2 vol. in-8o. Stuttgart et Tubingen, 1827.
  6. Mémoires du maréchal de Fleuranges, dans la collection Petitot, vol. XVI, p. 316.
  7. Voir les vol. II, III et IV de Hutten, et une dédicace dans le vol. Ve p. 157. — Ulrichi ab Hutten equitis Germani Opera, édition de J.-H. Münch, in-8o. Berlin, 1822.