Aller au contenu

Page:Revue des Deux Mondes - 1856 - tome 1.djvu/225

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

cières, dont l’une est la conversion de la dette. Malheureusement une portion notable des porteurs anglais des titres de la dette extérieure a refusé jusqu’ici d’adhérer à cette conversion, de sorte que le seul fonds portugais qui ait jamais eu une valeur positive n’était pas même admis à la bourse de Londres. Il s’agissait de faire cesser ce conflit. Sous ce rapport, le voyage de M. Fontes n’aura point été sans résultat, s’il est vrai, comme on l’assure, que la dette portugaise doive prochainement reparaître sur le grand marché régulateur du stock-exchange. Ce moyen de crédit reconquis, il restait à l’utiliser, et ce second objet de la tournée financière de M. Fontes paraît devoir être également atteint. Le ministre des finances du roi dom Pedro s’est occupé de négociations avec une grande société de capitalistes français et anglais qui prendrait immédiatement à sa charge la construction du réseau complet des chemins de fer portugais. Ce serait à coup sûr la plus immense révolution économique dans un pays qui, avec le sol le plus riche, le climat le plus varié et la plus telle position géographique de l’Europe, n’a pas même, à l’heure qu’il est, des routes ordinaires.

À l’extrémité orientale de l’Europe enfin est un pays à qui cette année n’a point souri non plus que la précédente : c’est la Grèce. Le royaume hellénique pourtant s’occupe à mettre un peu d’ordre dans ses affaires, assez troublées. Les chambres réunies le mois dernier sont parvenues non sans peine, bien que l’œuvre fût aisée, à voter leur réponse au discours d’inauguration du roi Othon. Le sénat et la chambre des députés ont paraphrasé la harangue royale. En général les membres du nouveau cabinet s’appliquent à écarter ce qui pourrait être un péril, à bien faire comprendre qu’il n’y a qu’un ministère de moins, que la politique reste la même, — une politique de neutralité, de bienveillance et de reconnaissance pour les puissances protectrices. Il faut bien avouer cependant que les derniers événemens ont laissé un désordre profond dans les imaginations helléniques. Que disait récemment un député publiciste d’Athènes ? Il disait que les Grecs, en se joignant aux insurgés de l’Épire, croyaient venir en aide aux alliés, bien loin de contrarier leurs desseins ; les Grecs n’avaient d’autre but que de devancer les Russes à Constantinople et de soutenir là sans doute un nouveau siège de Byzance contre un autre Mahomet ! C’est là justement l’effort qu’on ne demandait point aux Grecs, et plus ils insistent à se défendre d’avoir eu un moment d’hallucination périlleuse, plus il est à craindre que cette hallucination ne soit point entièrement dissipée, bien qu’elle se cache sous l’apparence de la résignation à une réalité plus modeste.

Dans le mouvement universel des choses, le Nouveau-Monde occupe certes une grande place, et cette place tend chaque jour à s’agrandir. Les États-Unis touchent peut-être à une période critique pour leur existence intérieure aussi bien que pour leur politique extérieure. Le message annuel du président au congrès est donc attendu avec une certaine impatience. On espère qu’il jettera quelque jour sur l’ensemble d’une situation qui est très grave et sur le véritable état des relations du cabinet de Washington avec l’Angleterre, car le différend n’est pas encore aplani, et le gouvernement anglais ne paraît pas disposé à reconnaître, par le rappel de son ministre, M. Crampton, qu’il ait eu dans l’affaire du recrutement les torts que l’attorney général, M. Cushing, lui a reprochés avec une amertume qui a fort envenimé le dé-