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Page:Revue des Deux Mondes - 1856 - tome 1.djvu/589

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ressources. Les draperies surtout n’étaient point traitées de la même manière par le sculpteur, quand le modèle devait être copié en marbre ou moulé en bronze. Le bronze permettait plus de mouvement, des plis fins et répétés, des jets hardis, des sinuosités profondes, au point qu’on démontrerait aisément, devant tel antique des musées de l’Europe, que c’est la copie en marbre d’un chef-d’œuvre en bronze. Qu’était-ce donc lorsque l’or se présentait à son tour ! Le sculpteur ne devait-il pas redoubler d’efforts pour tirer parti de son essence fine et ductile ? N’imaginait-il pas un système de plis différens ? Ne cherchait-il pas à multiplier la lumière par des jeux compliqués, à briser ses rayons pour les rallumer plus vifs, à ménager les ombres et les oppositions ? Sans déroger à sa grande manière, Phidias ne savait-il pas donner au métal une souplesse chatoyante pour en tirer les effets les plus magnifiques ? Aussi, à la place de M. Simart, n’aurais-je emprunté mes draperies ni aux vierges des Panathénées, ni aux caryatides du temple d’Erechthée. Les unes et les autres sont drapées avec une fermeté et une tenue droite que commandait le sentiment de l’architecture. Les caryatides surtout ont un caractère monumental : les plis de leur tunique tombent sur le sol comme les cannelures d’une colonne. Je me serais inspiré de l’admirable groupe des trois Parques, enlevé par lord Elgin au fronton oriental du Parthénon. Jamais l’art n’a rendu le vêtement avec plus d’abondance, de mouvement, de délicatesse, de couleur, j’entends cette couleur qui jaillit du ciseau. C’est dans un tel esprit, qui n’exclut point une simplicité chaste, que l’or voulait être traité. Au contraire M. Simart a prodigué aux ornemens l’éclat, la vigueur, la richesse ; là seulement l’or a toute sa chaleur, tandis que les parties essentielles sont d’une facture monotone, d’un aspect froid, condamnées aux tons blafards. La tunique n’est rien moins qu’un tissu d’or et de lumière ; on ne saurait dire, selon l’expression naïve des contes de fées, qu’elle est de la couleur du soleil. Le métal est à peine reconnaissable, si pâle qu’il se refuse aux sourires de la lumière et l’absorbe tristement. L’artiste a brisé lui-même le rameau d’or et renoncé à ses prestiges.

La liste est longue des causes compromises par ceux-là mêmes qui les voulaient rendre populaires. On ne saurait affirmer que M. Simart ait échappé à un danger semblable. S’il n’a point découragé le petit nombre de juges que M. Quatremère avait dès longtemps gagnés à la statuaire polychrome, si leur imagination charmée n’a point cédé aux impressions des sens, le public a passé froidement. On lui a nommé Phidias, il s’est incliné, mais en reléguant au nombre des fantaisies somptueuses du paganisme une œuvre où il ne reconnaissait point la marque saisissante de l’art qui n’a point