Aller au contenu

Page:Revue des Deux Mondes - 1856 - tome 1.djvu/619

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

nationale, sont autant de garanties de l’utilité de cette innovation agricole et industrielle, à laquelle vient d’être décernée la grande médaille d’honneur au concours universel. Le point de vue auquel s’est placé M. Champonnois diffère complètement de celui de ses prédécesseurs : ceux-ci, transformant les grandes sucreries ou installant de grandes distilleries, conservaient à ces vastes usines le type essentiellement manufacturier. C’étaient des fabriques d’alcool ayant à se débarrasser de résidus solides encombrans et de vinasses liquides sujettes à des inconvéniens graves pour le voisinage, par conséquent préjudiciables aux manufacturiers eux-mêmes. L’auteur de la nouvelle méthode s’est proposé au contraire d’introduire dans les fermes une industrie annexe dont le but principal est de fournir le complément utile, économique, de rations plus abondantes pour le bétail. Cette industrie considère l’alcool comme un bénéfice accessoire, supprime tout écoulement d’un liquide putrescible au dehors, et applique même à la nutrition des animaux les matières organiques azotées qu’un système plus manufacturier qu’agricole abandonnait à la putréfaction.

Depuis longues années, dans ses concours annuels, la Société centrale d’agriculture encourage l’introduction de certaines industries dans les fermes ; là se trouve une source féconde de progrès agricoles, le moyen de réaliser la plus grande somme de produits sur une superficie donnée de terre en culture, de propager dans les campagnes des notions scientifiques attrayantes, de familiariser les fermiers, les directeurs de culture, les chefs de charrue et les ouvriers à tous les degrés avec les applications de la vapeur au chauffage et au développement de la force mécanique. Ce sont autant de conditions indispensables à l’accomplissement des progrès à venir : il faut que les manufacturiers se fassent agriculteurs, ou que les agriculteurs deviennent manufacturiers. Et quand même, ce qui est peu probable, une extrême baisse des alcools, par suite de vendanges excessivement abondantes, diminuerait on ferait cesser les avantages réels de la distillation agricole des betteraves, les distilleries nouvelles auraient alors réalisé sans doute des profits supérieurs aux avances du capital engagé et aux intérêts. Il resterait dans les habitudes industrielles propagées, dans les nombreuses notions positives acquises, des élémens de nouveaux succès agricoles plus faciles à obtenir, et un grand service rendu à la chose publique.

Un exemple très remarquable peut être cité à l’appui des considérations qui militent en faveur de l’introduction de l’industrie dans les fermes. Il y avait à Bresles, dans le département de l’Oise, une grande exploitation rurale, établie en trois corps de fermes sur 500 hectares de terres, gérée pour le compte d’une association d’agriculteurs et de capitalistes. Cette exploitation, malgré l’emploi