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Page:Revue des Deux Mondes - 1856 - tome 1.djvu/787

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fière Lombarde subit le même sort que son mari, la réclusion monastique, et son front se courba sous le même linceul qui avait enseveli sa mère. Tassilon, enfermé d’abord dans le couvent de Saint-Goar, près de Rhinsfeld, fut ensuite transféré à Lauresheim, puis à Jumiége ; ses deux fils, Theudon et Theudebert, prirent comme lui l’habit de moine, ses deux filles le voile des religieuses. L’aînée fut recluse dans l’abbaye de Chelles, dont Gisèle, sœur de Charlemagne, était abbesse, l’autre dans celle de Notre-Dame de Soissons. Le trésor des ducs de Bavière alla grossir celui des Franks, et le pays, réuni au territoire de la France, reçut des gouverneurs royaux, qualifiés de comtes ou de préfets. Ainsi toutes les vieilles souverainetés de l’Europe, rois lombards, ducs d’Aquitaine, ducs saxons, ducs bavarois, descendaient l’une après l’autre dans le sépulcre ouvert aux rois mérovingiens. Du sein de cette mort anticipée, le monde des temps passés voyait s’élever les nouveaux temps, et les peuples de l’Europe, emportés par un mouvement irrésistible, marcher sur les pas d’une même famille à des destinées inconnues.

On eût pu croire les Avars éclairés ou découragés par la chute de Tassilon ; il n’en fut rien : le kha-kan avait mis toutes ses troupes sur pied ; lui et son peuple avaient compté sur un butin qu’ils ne voulaient pas perdre, et suivant le traité l’ait avec le duc de Bavière, une armée descendit en Italie vers le milieu de l’année 788. Elle attendit dans le Frioul, et tout en pillant suivant son usage, que la flotte partie de Constantinople eût débarqué en Italie Adalgise et les auxiliaires grecs. La flotte, selon ce qui avait été convenu, devait les déposer sur la côte de Ravenne ou dans le golfe de Trieste ; elle les transporta sur la pointe méridionale de l’Italie, où ils n’eurent rien à faire. En effet, le duc de Bénévent, Hérigise, étant mort subitement, sa veuve avait fait la paix avec Charlemagne dans l’intérêt de son fils Grimoald, et quand les Grecs voulurent pénétrer dans l’intérieur de la presqu’île, les Bénéventins leur barrèrent le chemin. L’armée franke, aidée de ces nouveaux alliés, mit en déroute les troupes d’Irène. Les Lombards, dont l’attitude avait été suspecte ou nettement hostile au nord de l’Italie, rentrèrent bientôt dans le devoir, et les Franks, tombant vigoureusement sur les Huns, en débarrassèrent le Frioul. Cet échec n’empêcha pas le kha-kan d’envoyer en Bavière sa seconde armée, qui fut également battue. Deux généraux franks, Grahaman et Odoacre, prenant le commandement des troupes bavaroises, vinrent attendre les Huns sur la rive gauche de rips, et défendirent si bien le passage de cette rivière, que le kha-kan se retira avec plus de dix mille hommes tués ou noyés. Une troisième armée, reprenant l’offensive, vint encore se faire battre. Il y avait eu de la part des Huns agression évidente et gratuite, attaque en pleine paix, violation du droit des gens : Charlemagne résolut