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Page:Revue des Deux Mondes - 1856 - tome 1.djvu/803

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impatiens, et que les meutes répondent par des aboiemens au claquement des fouets. Le roi entend d’abord la messe, puis il s’élance sur son vigoureux coursier tout harnaché d’or, et donne le signal du départ ; la troupe joyeuse, qu’il dépasse de toute la tête, se précipite après lui. Les jeunes chasseurs sont armés d’un épieu à pointe de fer ; quelques-uns portent un filet carré. Une rangée de leudes richement vêtus sert de cortège au roi. La belle épouse de Charles, la reine Liutgarde, se montre ensuite en tête de la royale famille. Un ruban de pourpre qui entoure ses tempes se relie à ses cheveux, que couronne un diadème de pierreries ; sa robe est de pourpre deux fois teinte, et une chlamyde retenue au cou par une agrafe d’or flotte gracieusement sur son épaule. Un collier des pierres les plus brillantes et les plus variées descend sur son sein ; elle monte un cheval superbe ; des leudes et des écuyers l’environnent.

« La royale lignée la suit à distance, chacun avec son cortège particulier. C’est d’abord Charles, le fils aîné du roi, qui porte le nom et les traits de son père, et fait bondir sous lui un cheval indompté ; puis Pépin, le vainqueur des Avars, en qui revit la gloire ainsi que le nom de son aïeul. Il porte au front le diadème des rois. Une foule de leudes, noble sénat des Franks, se presse autour des jeunes princes ; mais Louis d’Aquitaine est absent…

« Arrive ensuite le bataillon des jeunes filles, qui déploie aux yeux ses lignes étincelantes. Rotrude s’avance la première sur un cheval frémissant qu’elle guide avec adresse ; ses cheveux, d’un blond pâle, sont entrelacés d’une bandelette couleur d’améthyste que relèvent des escarboucles et des saphirs ; une couronne de perles décore son front, et son manteau est retenu par une large agrafe. Des suivantes en grand nombre et richement parées composent son cortège. Berthe vient ensuite : celle-ci a le port, les traits, la voix de son père ; elle a aussi son courage, car elle est son image vivante. Ses cheveux sont tressés de fils d’or ; elle porte au front une couronne d’or et au cou une fourrure d’hermine ; sa robe est toute parsemée de pierreries, et son manteau, cousu de lames d’or, projette au loin l’éclat des chrysolithes. Gisèle paraît la troisième : vierge pudique, elle a quitté la solitude des cloîtres pour suivre ici, dans l’agitation du monde, les traces du père qu’elle aime. La robe modeste de l’abbesse est tissue de fils de mauve et d’or ; on dirait que son visage et sa chevelure répandent une douce auréole, et, sous les regards de tant d’hommes, la blancheur de son cou se colore d’une légère rougeur. Sa main est d’argent, son front d’or, et la sérénité du jour est dans son regard. Une troupe d’hommes d’armes l’entoure d’un côté, une troupe de jeunes filles de l’autre, et leurs coursiers écumans s’agitent autour du sien. Rhodhaïde précède l’escadron de ses suivantes ; sa poitrine, son cou, ses cheveux, brillent de l’éclat des plus