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Page:Revue des Deux Mondes - 1856 - tome 1.djvu/853

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DES
TABLES PARLANTES
ET DES
ESPRITS FRAPPEURS


Les historiens anciens racontent que l’empereur Néron eut le désir de devenir habile dans les arts magiques. La magie de ce temps-là opérait par l’eau, par les boules, par le cuivre, par les lanternes, par les bassins, par la hache et par bien d’autres procédés au moyen desquels elle dévoilait l’avenir ; par-dessus tout, elle promettait de mettre les curieux en rapport et en conversation avec les ombres des morts et avec les divinités des enfers : ce fut ce qui tenta l’empereur Néron. La fortune l’avait élevé au faite des choses humaines. Maître de l’univers connu et des hommes, il voulut commander aux dieux et porter au-delà des limites terrestres cette extravagance d’une âme qui, mal née sans doute, était surtout stimulée par les aiguillons de la toute-puissance. Ni les accords de la lyre ni la déclamation tragique n’excitèrent davantage son envie ; à aucun art plus qu’à la magie il ne donna faveur et appui. De plus, rien ne lui manquait, ni la richesse, ni les forces, ni le talent d’apprendre, ni toutes ces énormités desquelles le monde finit par se lasser. Les magiciens d’alors avaient des échappatoires pour les cas où leurs opérations ne réussissaient pas : quand celui qui invoquait les divinités était affecté de quelque défaut corporel, elles ne lui obéissaient pas ou ne lui étaient pas visibles ; mais cela ne faisait pas obstacle chez Néron, dont le corps était parfait. Il pouvait choisir les jours favorables ; il pouvait immoler des victimes qui toutes fussent de couleur noire. Tiridate