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Page:Revue des Deux Mondes - 1856 - tome 2.djvu/586

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heureux, car elle tend à élever le crédit de l’état, à lui procurer à des conditions plus avantageuses les ressources extraordinaires dont il peut avoir besoin, et elle permet à la commandite d’appliquer sans cesse de nouvelles forces aux grandes entreprises destinées à développer la richesse générale. Il est donc utile de maintenir et d’étendre cette popularité ; mais ce serait s’exposer à manquer le but que de recourir pour cela à des expédiens contraires aux lois économiques, et à des mesures qui feraient sortir le crédit commercial de ses attributions naturelles. On est tombé, suivant nous, dans cette erreur en obligeant la Banque de France et le Comptoir d’escompte à prêter sur dépôts de valeurs industrielles.

Il y a, entre la nature et la forme de ces valeurs, une distinction qu’il ne faut jamais perdre de vue. Par leur nature, elles constituent un capital fixe, immobilier. Par leur forme, c’est-à-dire par l’extrême division et le caractère anonyme de leurs titres, elles ont, quant à leur transmission, les attributs des valeurs mobilières. Ce sont, en un mot, des propriétés immobilières douées seulement de la forme mobilière.

Considérées comme propriétés, c’est dans la classe des capitaux qui leur sont analogues qu’elles doivent trouver les ressources de crédit dont leurs détenteurs peuvent avoir besoin. Elles représentent un capital fixe ; c’est à la classe des capitaux destinés aux placemens fixes qu’elles doivent emprunter le secours du crédit. D’ailleurs, par la forme qu’on leur a donnée, par la facilité de transmission et de circulation dont on a doué leurs titres, on a fait pour elles d’un seul coup et d’emblée tout ce que le crédit peut faire pour une marchandise, une propriété, une valeur quelconque. Nous l’avons vu en effet, la forme la plus parfaite du crédit, le crédit commercial, n’a pas d’autre objet que d’accélérer la circulation des valeurs créées par la production en leur donnant le temps de parcourir les diverses transformations qu’elles doivent recevoir avant d’arriver à la consommation, à la vente, à la réalisation en numéraire ; mais le titre de rente, l’action industrielle n’ont à recevoir aucune transformation pour arriver à la vente : ils sont au contraire investis de la forme définitive et invariable qui les rend les plus propres à être immédiatement et constamment vendus et achetés. Les mettre à la portée de la classe des capitaux par lesquels elles doivent, conformément à leur nature, être achetées et possédées, voilà tout ce que le crédit avait à faire pour ces valeurs, et il l’a fait en donnant à leurs titres le caractère anonyme et une extrême divisibilité, ce qui permet toujours à leurs détenteurs de les vendre pour parer à leurs plus minimes besoins, et ce qui permet toujours de les acquérir aux plus minimes capitaux qui cherchent des placemens fixes.

La circulation des titres de rentes et des actions industrielles devrait