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Page:Revue des Deux Mondes - 1856 - tome 3.djvu/578

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profits ! C’est par centaines de mille qu’il faut compter les dollars qui sont employés chaque année à des annonces de cette nature. On cite un certain docteur Morehead, inventeur de ceintures magnétiques, qui, outre ses frais d’annonces, a dépensé trente mille dollars en une année pour la publication d’un almanach qu’il donne gratis au public.


III. – CARACTERES ET MEOURS DE LA PRESSE AMERICAINE.

Nous n’avons pas à faire la nomenclature de la presse américaine ; une telle entreprise, outre ce qu’elle aurait d’ennuyeux, est presque impraticable, et nous ne pouvons que renvoyer le lecteur curieux à la liste que nous-même en avons donnée dans une publication voisine de la Revue[1]. Il y trouvera en abondance des Boston Post, des Philadelphia Ledger, des Washington Union, des New-Orlean’s Daily Picayune. Un seul fait ressortirait de cette liste, et nous pouvons l’énoncer ici : c’est le nombre prodigieux d’élémens contraires et hétérogènes qui fermentent ensemble dans cette cuve démocratique. Journaux politiques, religieux, étrangers, accusent la présence de sectes ennemies ou rivales, d’intérêts infiniment divers, de populations dissemblables éparses sur le sol de l’Union. Irlandais, Allemands, Hollandais, Espagnols, Italiens, ont leurs organes rédigés exclusivement pour eux et dans leur propre langue. Les intérêts des Indiens sont représentés par un journal qu’écrivent en langue indigène deux avocats peaux-rouges. Tout intérêt de circonstance, tout phénomène passager trouve aussitôt une voix pour s’exprimer. Chaque élection présidentielle fait éclore un certain nombre de journaux destinés à soutenir les diverses candidatures et à s’éteindre après le vote populaire. Les rapping spirits et les tables tournantes ont leurs organes : une vingtaine de journaux et sept ou huit magazines au moins. C’était le chiffre qu’on donnait il y a deux ans ; il est possible qu’il ait augmenté, et il n’est malheureusement pas probable qu’il ait diminué. Il y a mieux cependant que tout cela : les fous eux-mêmes, avons-nous lu quelque part, ont leur journal, destiné sans doute à servir d’interprète à tous les Bedlams du Nouveau-Monde. Nous regrettons de ne pouvoir placer sous les yeux de nos lecteurs quelques échantillons de cette littérature, réellement nouvelle et jusqu’à présent inconnue. Laissons de côté toute aride nomenclature, et essayons de montrer ce que c’est qu’un journal et surtout un journaliste américain.

Un journal américain, pour peu que vous ayez déplié celui-ci ou

  1. L’Annuaire des Deux Mondes pour 1850.