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Page:Revue des Deux Mondes - 1856 - tome 3.djvu/618

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opérations, modifier les prix à leur profit, considérons un instant les diverses classes de personnes qui sont intéressées et qui prennent part à ce commerce.

Il faut ranger en première ligne celles qui ne font point métier de ce commerce, et qui n’y prennent part qu’accidentellement pour des motifs légitimes et sérieux. Ce sont celles entre lesquelles se répartit la propriété des valeurs négociées à la Bourse, la classe des propriétaires de rentes, d’actions et d’obligations, qui les ont acquises et qui les gardent comme un placement fixe en vue des revenus qu’elles donnent. De cette masse de valeurs classées, il s’en détache chaque jour une certaine quantité que leurs propriétaires vendent pour parer à des besoins ou pour porter leurs fonds dans d’autres placemens. Chaque jour aussi, en regard de ces détenteurs de titres classés qui se défont de leurs valeurs, il se présente des gens qui veulent acheter des valeurs, dans des conditions analogues, pour faire des placemens fixes en vue de certains revenus. Ce sont ces deux besoins simultanés et destinés à se satisfaire l’un par l’autre qui établissent ce qu’on pourrait appeler le marché naturel des valeurs négociées à la Bourse. Celui de ces deux besoins qui est le plus vif subit la loi de l’autre. Si le besoin de vendre est plus considérable et plus pressant que celui d’acheter, les prix baissent jusqu’au point où ils puissent tenter un nombre d’acheteurs proportionné au nombre des vendeurs. Si au contraire le capital disponible abonde et recherche les placemens, les prix montent jusqu’au point où ils puissent décider à se départir de leurs valeurs un nombre de propriétaires de titres qui soit en rapport avec le nombre des acheteurs. Les opérations auxquelles donnent lieu ces rapports entre les propriétaires de titres qui vendent et les détenteurs de capital disponible qui achètent des valeurs comme placement se font au comptant, du moins lorsqu’elles portent sur de petites sommes.

Après cette classe de gens intéressés sérieusement au prix des valeurs par le besoin réel d’en vendre ou d’en acheter, il faut placer ceux qui n’ont dans les opérations de bourse d’autre mobile qu’un intérêt de spéculation. On peut distinguer trois sortes de spéculateurs : 1° ceux qui spéculent avec des ressources réelles et qui sont en état de liquider leurs opérations, soit en livrant des titres qui leur appartiennent s’ils ont vendu, soit en payant les titres avec leur propre argent s’ils ont acheté ; 2° ceux qui font profession de spéculer dans des proportions qui dépassent leurs ressources, qui ne pourraient ni lever les titres qu’ils vendent ni payer les valeurs qu’ils achètent, et qui ne font entrer dans leurs prévisions que le gain ou la perte d’une différence ; 3° les spéculateurs d’occasion, ceux qui font une opération à la Bourse accidentellement, et qui