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Page:Revue des Deux Mondes - 1856 - tome 3.djvu/805

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ce fait dans cette circonstance importante, que les végétaux primitifs avaient acquis un développement foliacé énorme, tandis que leurs racines étaient à l’état rudimentaire.

D’un autre côté, nous savons, car nous pouvons reproduire ceci à volonté, que dans un sol de sable calciné et parfaitement privé de tout détritus végétal on peut obtenir des végétations florissantes, si l’on ajoute à l’air un composé azoté tel que l’ammoniaque, accompagné d’un excès d’acide carbonique. En opérant ainsi et par la nutrition foliacée, je suis parvenu à pousser les dimensions de certaines plantes, et entre autres d’un caladium, bien au-delà des limites ordinaires. Ainsi pas de doute : la végétation primitive s’opérait exclusivement aux dépens de l’atmosphère, et celle-ci avait une composition différente de celle de nos jours. Le composé azoté qui en faisait partie était-il de l’ammoniaque ? Je l’ai cru pendant longtemps ; mais depuis que j’ai reconnu que les nitrates dissous dans l’eau agissent comme le gaz ammoniaque, je n’ose me prononcer à cet égard, car si on réfléchit aux actions chimiques qui pouvaient se produire alors, notamment sous la puissante influence de l’électricité, on trouve à peu près autant de motifs pour admettre la formation des nitrates que celle de l’ammoniaque. Il est donc bien certain que l’atmosphère ou les eaux d’alors contenaient, au nombre de leurs principes constituans, une combinaison d’azote dont l’atmosphère et les eaux de nos jours sont dépourvues.

D. — Mais, puisque l’on peut déduire avec une certitude si inespérée les conditions qui ont présidé aux végétations primitives, ne pourrait-on revenir à la flore antédiluvienne en opérant sur les fougères, les prêles, les lycopodes, tous représentans dégénérés de ces mêmes plantes si énormes aux premiers âges du monde ?

R. — Je n’y vois rien d’impossible, surtout en ajoutant aux élémens d’une atmosphère artificielle, composée d’après les conditions qu’on vient d’énoncer, les influences réunies de la chaleur et de l’humidité. Ce que j’ai déjà obtenu dans des serres soumises au régime combiné de l’acide carbonique et de l’ammoniaque me semble auto riser cette présomption.

D. — Je reviens aux animaux, et je demande pourquoi on ne tenterait pas de produire sur eux les transformations qui ne paraissent pas impossibles sur les plantes. Dans une atmosphère convenable, l’éclosion des œufs d’une fourmilière pourrait-elle produire autre chose que des fourmis ? Même question par rapport au frai des poissons.

R. — Je ne puis répondre à ces questions. Les fonctions des animaux inférieurs à l’époque de leur premier développement ne me semblent pas assez connues pour qu’on puisse tracer sans autre préparation