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Page:Revue des Deux Mondes - 1856 - tome 6.djvu/231

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choisis, MM. van Goltstein, Strens et van Bosse, étaient tous des hommes dévoués aux principes constitutionnels ; deux d’entre eux ont même fait partie, il y a quelques années, de l’administration libérale de M. Thorbecke. Le candidat ministériel, M. van Rappard, a été exclu de la liste. Le roi a donc été obligé de choisir parmi les candidats qui lui étaient présentés. Il a nommé M. van Goltstein, et le premier acte de celui-ci, qui appartient d’ailleurs à l’opinion libérale la plus modérée, a été de se prononcer contre toute velléité de réaction, de placer sa présidence et les travaux de la chambre sous l’autorité de la constitution. Dans les conjonctures du moment, cette démonstration était significative et préparait la prochaine discussion de l’adresse. Lorsque cette discussion s’est ouverte, la lutte a été des plus vives en effet. L’adresse de la seconde chambre a eu une véritable portée politique par les termes dans lesquels elle a été conçue et par les débats auxquels elle a donné lieu. Ce n’était plus, comme il est d’usage, une simple paraphrase du discours de la couronne. La chambre hollandaise a mis une extrême netteté dans son langage, abordant toutes les questions, surtout celle de l’enseignement, qui est le grand objet de litige entre les partis, et repoussant d’avance toute solution qui ne serait point conforme aux principes de liberté et de tolérance proclamés par la constitution. Le président de la commission de l’adresse, M. van Zuylen van Nyevelt, n’a point hésité à déclarer qu’il y avait nécessité de parler au roi avec tout le respect possible, mais sans détour, après les événemens des derniers mois, lorsqu’on avait vu surgir tout à coup un cabinet dont rien n’expliquait la présence au pouvoir, et qui n’avait d’autre caractère jusqu’ici que d’être une protestation contre l’esprit de la majorité de la chambre.

L’adresse était très franche : les partisans du gouvernement l’ont trouvée un peu factieuse ; ils y ont vu de la froideur envers le roi, une méfiance systématique envers le cabinet. Le ministre de la justice, M. van der Bruggen, a cherché à expliquer la crise du mois de juillet ; il a défendu le cabinet de toute velléité réactionnaire en protestant de son respect pour la loi fondamentale. Ces déclarations plus tranquillisantes n’ont point empêché l’adoption de l’adresse après quelques modifications légères qui ont pu en adoucir les termes sans en altérer le sens. Le cabinet ne s’est pas montré très difficile ; il s’est contenté de la simple assurance que la chambre examinerait les projets qui lui seraient soumis. Au surplus, l’opposition était dirigée moins contre les ministres eux-mêmes que contre le parti ultra-protestant. M. Groen van Prinsterer, considéré comme l’instigateur de la dernière crise, comme le conseiller et le protecteur du nouveau cabinet, M. van Prinsterer a lutté sans beaucoup de succès pour faire prévaloir certains amendemens, et il a essuyé de vives répliques lorsqu’il a cherché à intimider la chambre en faisant apparaître derrière la représentation légale du pays l’image du peuple, ce qui peut paraître singulier, venant du chef d’un parti qui, entre ses qualifications diverses, prend celle d’anti-révolutionnaire.

On voit les rapports dans lesquels restent le parlement et le ministère à La Haye après la discussion de l’adresse. Ces rapports sont visiblement froids et dépourvus de toute sécurité. La loi de l’enseignement, toujours réclamée et plusieurs fois élaborée, a été la cause de la crise ministérielle du mois de juillet dernier ; elle sera encore d’ici à peu l’inévitable champ de bataille. Si le