Page:Revue des Deux Mondes - 1858 - tome 13.djvu/812

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

dans lequel ces anciens tombeaux se présentent maintenant aux regards du voyageur. Les antiquaires anglais ont reconnu que ces entassemens de pierres avaient été originairement recouverts par des ouvrages de terrassement. Ces tertres s’élevaient à une hauteur plus ou moins grande, selon la nature des localités et aussi selon l’importance du défunt. Ils renfermaient une chambre grossière en pierres brutes, quelquefois d’une dimension colossale : c’était la chambre mortuaire, le sépulcre[1]. Le plus souvent, il est vrai, les tumuli bretons se montrent dénudés ; mais ils ont été ouverts après coup par des mains avides, qui croyaient y découvrir des trésors. On a enfin trouvé dans les îles de la Manche des cryptes avec leur couverture primitive. C’est dans de telles chambres sépulcrales qu’ont été surtout recueillis les objets d’art auxquels nous devons nos quelques connaissances sur le caractère et les mœurs du peuple qui a élevé ces monumens. « Si les bouches se taisent, dit la Bible, les pierres parleront. » Les pierres ont parlé. Une histoire posthume est sortie de ces tombeaux dans lesquels une race mystérieuse avait enseveli le secret de son humble état social[2]. Les recherches de M. Lukis sur les sépulcres celtiques des îles du détroit ont montré que ces chambres de pierre avaient été pratiquées de génération en génération. Cela donne une assez grande idée de ce peuple, qui avait tenu à cœur de se survivre jusque dans la mort par d’indestructibles ouvrages. Les anciens Celtes paraissent avoir négligé ces maisons où l’homme séjourne peu de temps, et avoir réservé toutes les ressources d’une architecture informe, mais grandiose, pour illustrer ces autres demeures où l’homme fait un bail avec l’éternité.

Depuis que la philosophie de l’histoire a renoncé, et il le fallait bien, à la fiction des peuples autochtones, elle s’est engagée à rechercher le berceau des différentes races qui ont graduellement déposé le sol de la civilisation moderne. D’où venaient les Celtes ? L’Europe fut peuplée dans les temps antéhistoriques par diverses migrations successives, véritables déluges où le flot poussait le flot. Ces déluges d’hommes partaient néanmoins d’un point unique, l’Orient. Les deux plus anciennes migrations sont celles des Celtes et des Germains, deux rameaux de la grande race de Japhet. Les Celtes vinrent les premiers dans l’ordre des temps, et, se frayant un chemin, selon toute vraisemblance, à travers les déserts qui bordaient alors la Méditerranée, se répandirent dans l’ouest de l’Europe. L’origine

  1. Il suffit d’indiquer ici la forme la plus simple des anciens cromlechs ; mais nous devons avertir qu’il y en avait d’une structure plus compliquée.
  2. On peut surtout consulter la large collection d’antiquités celtiques formée par Richard Hoare.